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Armenolobby Caroline Sägesser

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Savez-vous que la Belgique reconnaît et finance des églises, des mosquées, des synagogues et même d’autres lieux de culte? Savez-vous que l’Etat y consacre 280 millions d’Euros de vos impôts ? Mais quels cultes finance-t-elle? Et pourquoi l’église arménienne ou d’autres cultes minoritaires ne sont-ils ni reconnus, ni financés? Pour le savoir, rendez-vous sur l’émission Armenolobby, sur Belgahay, avec notre invitée, Caroline Sägesser, chargée de recherche au CRISP et spécialiste de la question.

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Armène Lobby is a radio show that focuses on politics and media. Politics affects our lives in many ways, from education to the price of electricity. The show discusses Belgian politics and the situation in the Haut-Karabakh region. They also talk about upcoming elections in Belgium. The guest on the show is Caroline Sagesser, a researcher who specializes in the history of religion and its relationship with the state. They discuss the funding of religious institutions in Belgium and the challenges it presents. The Belgian system of funding religions is complex, with the government paying salaries of ministers and providing financial support for places of worship. The system works well for the Catholic Church but has difficulties with other religions, such as Islam. There are also challenges in representing different branches within religions, like Orthodox Judaism and various forms of Protestantism. Armène Lobby, votre émission avec Nicolas Tavitian et ses invités, tous les lundis à 15h et les mercredis à 11h. Retrouvez également tous les numéros d'Armène Lobby en podcast sur l'application Belga High pour smartphone. Pour se faire, rendez-vous sur Play Store ou Apple Store et téléchargez gratuitement l'application Belga High pour votre téléphone Android ou iPhone. Bonjour et bienvenue sur Armène Lobby, l'émission qui s'intéresse à la politique et aux médias. Si cette émission s'intéresse à la politique et aux médias, ce n'est pas parce que c'est un hobby. C'est que, comme on le formule parfois, si vous ne vous intéressez pas à la politique, elle, elle s'intéresse à vous. Notre monde, notre vie est politique. L'éducation de nos enfants, la route sur laquelle vous allez au travail, le prix de l'électricité, presque tout est lié directement ou indirectement à des décisions politiques. Sans parler évidemment des questions de guerre et de paix. Et l'année dernière, nous avons beaucoup parlé de ce que font, de ce qu'ont fait les politiques belges sur la question du Haut-Karabakh, de l'Artsakh. Malheureusement, la situation reste très tendue, vous le savez certainement, et les déclarations du dictateur Aliyev ont pensé que la guerre reprendra sans doute cette année. Et puis, cette année 2024, l'actualité, ce sera aussi les élections en Belgique, le 9 juin prochain. Nous en reparlerons beaucoup sur cette antenne, j'en suis certain, pour savoir quelles sont les intentions des candidats et de leur parti sur les questions qui nous intéressent. Mais aujourd'hui, je voudrais vous parler d'un sujet tout à fait différent, quelque chose qui se passe en Belgique, tout près de chez vous, quelque chose qui concerne la vie quotidienne ou presque, et quelque chose de politique. Et il s'agit du financement des cultes et des lieux de culte en Belgique. Il s'agit donc de religion. Les lieux de culte, ce sont les églises, les mosquées, les synagogues et autres temples. Vous allez voir, c'est passionnant et parfois surprenant. Et pour en parler, j'ai invité aujourd'hui Caroline Sagesser, j'espère que je prononce correctement, mais tout à fait bien, tout à fait bien, Caroline, qui nous fait le plaisir de nous rendre visite dans les studios de Belgaraï. Caroline Sagesser, elle est chargée de recherche au sein du secteur sociopolitique du CRISP. Le CRISP, c'est l'un des principaux think tank de Belgique, qui est basé à Bruxelles. Et le CRISP, Caroline est docteure en histoire et ses principaux sujets de recherche sont l'histoire politique, le fonctionnement des institutions et enfin les cultes et la laïcité. Caroline, bonjour. Bonjour. Bienvenue sur Belgaraï. Alors, je voudrais commencer par en savoir, vous demandez de parler un petit peu davantage de vous et de votre travail. Vous êtes, je crois, d'origine suisse. Vous êtes suisse également de nationalité. Qu'est ce que vous voudriez dire aux auditeurs à votre sujet? Eh bien, moi, le sujet des religions et de leur rapport avec l'État me passionne depuis depuis 25 ans. Au départ, quand j'ai décidé de consacrer une thèse de doctorat à cette question du financement des cultes, mon entourage m'avait dit mais avec quoi tu viens? La religion, c'est has been, la sécularisation de la société est en marche et bientôt, on ne parlera plus de religion. Ce n'est pas du tout un sujet porteur. Et depuis lors, on s'est rendu compte qu'on n'a sans doute jamais quasi autant parlé de religion, en particulier dans les enseignes politiques, dans les parlements. Il y a énormément de questions qui se mettent à l'agenda politique et qui ont un lien avec le religieux. On peut penser évidemment au port de signes convictionnels, à l'abattage rituel, à toutes ces thématiques autour de la neutralité de l'État et alors à la question du financement. Parce qu'en Belgique, on a un très vieux système qui date de Napoléon, qui est assez mal adapté. On va en parler sans doute à la société d'aujourd'hui. Et ça pose aussi beaucoup de questions parce qu'il y a des volontés de réforme et qu'il y a aussi en cette matière des volontés d'économie, ce qui conduit souvent le politique à mettre cette question à l'agenda aussi. Ah oui. Et donc, avant d'entrer dans le cœur de la matière, il y a eu un retour. Vous avez été témoin d'un retour du religieux, d'un renforcement de la question religieuse dans la société. Oui, totalement. Alors, je ne suis pas sûre qu'on puisse évoquer vraiment un retour du religieux dans la société, dans la mesure où pour les religions qui sont les principales en Belgique et qui sont implantées depuis très longtemps, en particulier le catholicisme, évidemment, mais aussi le protestantisme luthérien, il y a toujours encore une perte de vitesse et il n'y a pas de retour des fidèles dans les lieux de culte. Par contre, il y a toute une série de communautés issues de l'immigration qui sont très dynamiques, qui sont très pratiquantes. Mais je ne crois pas que globalement, la société soit plus religieuse qu'il y a 30 ans. En revanche, il y a toute une série de questions qui se posent et qui sont à l'agenda politique, alors que le religieux dans les années 60, par exemple, n'était plus à l'agenda politique. La question avait été réglée au niveau du financement au siècle précédent et on ne se posait guère la question de l'évolution du système. Alors, justement, le système, la Belgique, un système assez particulier de financement des cultes. Est ce que vous pouvez nous en parler, nous expliquer d'où ça vient? On parlait de Napoléon tout à l'heure. Oui, alors, très simplement, la Belgique, c'est un système qui cumule les avantages de l'indépendance avec des bénéfices de l'Union. Et ça, ce n'est pas moi qui le dis, c'est le peuple et on tresse en se penchant sur l'indépendance des religions par rapport à l'État. Donc, nous avons un système hybride sans vouloir revenir à la Constitution, à sa lettre. Disons simplement qu'on a un système qui, d'une part, prévoit l'indépendance des cultes des pouvoirs publics. Donc, il n'y a pas de tutelle des pouvoirs publics sur les cultes. Il n'y a pas non plus d'église d'État, d'église officielle, comme on peut le connaître en Angleterre, par exemple. Mais il y a aussi un financement public et ça, c'est très particulier. On connaît souvent bien l'exemple de la France. La France est un pays qui a longtemps financé les cultes. Et puis, à un moment donné, une option politique a été prise en 1905 de séparer l'église et l'État. Et donc, les cultes ont été totalement émancipés de la tutelle du droit de regard des pouvoirs publics, mais ils ont également perdu le financement. En Belgique, il n'y a pas de tutelle sur les religions. Par contre, il y a un financement public. Et ça, c'est assez compliqué à organiser parce que, voilà, il y a deux voies principales de soutien financier aux cultes par les pouvoirs publics. La première voie, c'est le paiement des salaires des ministres des cultes. Et la deuxième voie, ce sont des interventions financières pour les lieux de culte. Mais partons sur les salaires. Le ministère de la Justice en Belgique paye les salaires des ministres des cultes. Mais ce n'est pas lui qui les choisit. Les prêtres, les imams, les rabbins, ce n'est pas lui qui les choisit. Alors, comment savoir à qui il faut payer ce salaire? C'est là qu'intervient le rôle des autorités du culte, de ce qu'on appelle en Belgique l'organe représentatif. Alors, ce système qui a été conçu par Napoléon fonctionne très bien pour l'Église catholique parce que tout le monde sait que c'est une église organisée, que ce sont les évêques qui nomment au curs et donc les évêques transmettent aux ministres de la justice régulièrement le nom des prêtres dont il faut payer le traitement. Il y a une hiérarchie très claire qui commence à Rome, qui passe par les... Par contre, pour les autres cultes, c'est compliqué et en particulier la Belgique a été en 1974 le premier pays à reconnaître l'islam. Mais cette reconnaissance théorique votée par le Parlement en 1974, il a fallu près de 30 ans pour qu'elle porte véritablement ses effets au niveau du financement parce qu'on n'avait personne pour nous dire voilà, voilà les imams qu'il faut payer. Et donc, il y a beaucoup de difficultés pour que ces nouveaux cultes, entre guillemets, ils ne sont pas nouveaux intrinsèquement, ils sont nouveaux dans le paysage institutionnel belge pour que ces cultes puissent finalement s'organiser d'une façon qui permette au système belge de fonctionner. D'accord. Et pour parler, donner d'autres exemples de cultes qui sont financés et comment ils sont organisés en Belgique. Il y a le culte judaïque ou les différents cultes judaïques, par exemple. Il y a quatre cultes qui sont organisés en Belgique depuis le 19e siècle. Le catholicisme, le protestantisme, le judaïsme et l'anglicanisme. Et au 20e siècle, dans le dernier quart du 20e siècle, on a ajouté l'islam et le christianisme orthodoxe. Donc, c'est une liste très restreinte. Et effectivement, ces problèmes de représentation se posent un peu pour tout le monde. Prenons le cas du judaïsme. Eh bien, au sein du judaïsme, il y a une forme extrêmement orthodoxe de la pratique. Les rabbins que l'on voit souvent à Anvers, qui sont d'ailleurs reconnaissables dans leur apparence physique. Et puis, il y a toute une communauté juive libérale, moderne, que rien ne distingue dans l'apparence de ses autres concitoyens. Et c'est difficile de faire cohabiter au sein d'un organe représentatif ces deux tendances. Même chose pour le protestantisme, qui se compose de différentes branches. Il y a un protestantisme lui aussi très libéral, très moderne, avec des femmes pasteurs. Et puis, il y a des formes de protestantisme, en particulier du côté des églises pentecôtistes, évangélistes, où on est beaucoup plus fermé, où on n'admet pas que les femmes soient pasteurs, où on a des visions, je dirais, morales extrêmement conservatrices. Mais là aussi, c'est difficile de faire cohabiter ces gens dans la même organisation. Mais malgré tout, ils doivent. C'est comme ça que ça fonctionne. Ils doivent gérer une organisation ensemble et distribuer l'argent à tous. Et dans l'ensemble, ça fonctionne. Ça ne fonctionne qu'à un cas, donc il y a toujours quelque part des laissés pour compte dans notre système, qui est finalement très restrictif. Et puis, je ne sais pas si ça va encore fonctionner longtemps, parce qu'en avril 2022, la Belgique a été condamnée par la Cour européenne des droits de l'homme à Strasbourg, précisément parce que notre régime des cultes est opaque et discriminant, puisqu'en fait, vous êtes reconnus au bon vouloir du Parlement. La Belgique n'a pas de loi organique des cultes qui viendrait dire pour être un culte reconnu, voilà les critères auxquels vous devez se satisfaire. C'est vraiment finalement un système un peu à la tête du client. Il n'y a pas de procédure claire pour se faire reconnaître. On écrit une belle lettre au ministre de la Justice et puis on fait une petite prière en espérant qu'on soit qu'on soit entendu. C'est comme ça que ça fonctionne. Donc, il y a un vrai problème. Il y a aussi un autre problème, je dirais, en aval. Une fois qu'on est reconnu, comment est ce qu'on répartit l'argent entre les différents groupes qui sont reconnus? Et là aussi, c'est un peu une négociation avec chaque culte. Donc, il n'y a pas non plus de critères clairs pour répartir les fonds. Donc, on a vraiment un système, je crois, qui a fait son temps. Donc, ça ne dépend pas du nombre de fidèles ou des frais des églises ou des mosquées. Alors la répartition de l'argent? Tout d'abord, il n'y a pas d'intervention de ce type au niveau de la reconnaissance des cultes. Mais alors ensuite, quand un culte est reconnu, effectivement, la Belgique étant un Etat fédéral, rien n'est très sain. C'est la Belgique, l'État fédéral, l'État central qui reconnaît le culte. Et puis, ce sont les différentes régions qui vont reconnaître ou agréer les différents lieux de culte. Et là, effectivement, il y a des critères parmi lesquels figurent effectivement le fait d'avoir pour un lieu de culte un nombre suffisant de fidèles. Mais les pouvoirs publics, au nom justement de ce principe de séparation, n'envoient personne compter les fidèles dans les lieux de culte. Donc, là aussi, finalement, on croit un peu les personnes sur base de leur déclaration, sur leur bonne foi. Et donc, votre message, c'est que le système est un petit peu bancal et il va falloir le réformer. Oui, je pense qu'effectivement, si nous voulons avoir un système qui passe le test de l'égalité et de la non discrimination, il faut effectivement le réformer parce que c'est finalement de l'argent des contribuables belges qui est utilisé et il est profondément discriminant que certaines personnes, en raison de leur foi, finalement, bénéficient de ce soutien financier et que d'autres n'en bénéficient pas parce que leur église n'est pas reconnue par les pouvoirs publics. Il ne pourrait pas l'être parce que la procédure est justement tellement peu claire, tellement opaque, qu'il y a peu d'espoir d'y arriver. Bon, alors là, vous me tendez la perche. Évidemment, si on vous a invité, c'est pour parler aussi parce que cette législation concerne aussi l'église arménienne ou plutôt la disposition de la Constitution dont on parle, concerne aussi l'église arménienne ou devrait la concerner. L'église arménienne ne bénéficie pas de toutes ces dispositions et d'un financement de l'État en Belgique. Donc, elle fait partie. Je crois qu'elle n'est pas la seule parmi les cultes existants en Belgique qui n'est pas financée par l'État. Donc, c'est à ça que vous faites référence. Alors, comment est-ce qu'on explique cette situation ? Comment est-ce que vous expliquez cette situation ? Donc, que ce soit pour l'église arménienne ou pour d'autres, qu'il ne soit pas financé. Et puis ensuite, on parlera peut-être de la façon d'y remédier, d'y rémédier si c'est possible. Je crois que l'explication, elle est historique. Quand le système a été créé en Belgique, on a hérité en fait largement ce système de Napoléon. 99,5% de la population était catholique. Donc, le système a été complètement pensé pour une grosse religion, pour une religion bien organisée, bien hiérarchisée. Sans doute qu'aujourd'hui, si on devait recommencer à partir d'une page blanche, si on devait regarder la diversité convictionnelle du paysage belge, on n'agirait plus de cette façon-là. Mais on est vraiment face à un système qui est conçu avec un nombre très limité de bénéficiaires, qui structure la société. Et le système n'est pas prévu pour des groupes plus petits en taille. Et les pouvoirs publics aussi n'ont pas le réflexe de se dire qu'il faut ouvrir le système, y compris à des groupes minoritaires, parce que je crois qu'ils ont très peur de voir une multiplication des différents groupes. Et puis, il y a aussi un élément qui joue maintenant. Le gros dossier en matière de reconnaissance des cultes, en matière d'organisation du financement, c'est le dossier de l'islam, qui a connu pas mal de vicissitudes, de péripéties. Et je crois que les pouvoirs publics sont un peu tétanisés à l'idée de devoir reconnaître, en le cas échéant, plusieurs groupes à l'intérieur de l'islam. Alors, on sait que c'est compliqué d'avoir un représentant unique pour l'islam de Belgique, parce qu'il y a des différences religieuses, des sunnites, des fiites, puis aussi des alévis, parce qu'il y a aussi des origines nationales, comme d'origine marocaine, d'origine turque, d'origine pakistanaise. Mais les pouvoirs publics insistent vraiment pour avoir un interlocuteur unique. Et dans ce contexte, ils ne sont pas disposés à reconnaître de nouvelles églises chrétiennes, parce qu'il y a déjà les catholiques, les protestants, les anglicans, les orthodoxes. Et donc, continuer à contraindre les juifs, les musulmans à travailler avec un organe représentatif unique et accueillir la diversité du monde chrétien, ce serait un peu compliqué pour eux. Je crois qu'il y a vraiment un changement de logiciel qui devrait s'opérer au niveau politique pour qu'on se dise maintenant, voilà le monde d'hier avec une église catholique toute puissante et puis deux ou trois autres religions à vécu. Les pratiques sont différentes, les communautés convictionnelles sont éparpillées. Il faut vraiment changer de logiciel. Comme quoi, même quand on commence par parler de loi et d'argent, on finit toujours par parler de philosophie. Finalement, est-ce qu'une religion est unique ou comment est-ce qu'on tient compte de la diversité à l'intérieur d'une croyance? Est-ce qu'il y a un nom, une étude? Est-ce qu'ils sont tous pareils? Est-ce qu'il faut forcément tous les réunir? Heureusement, ça veut dire qu'on n'est pas prisonnier non plus de la loi. Il faut que la décision politique permette de s'appuyer sur l'évolution des mentalités pour faire changer la loi. C'est un peu dommage en matière d'éculte. On se dit souvent qu'on est prisonnier du dispositif constitutionnel parce qu'ils n'ont pas changé depuis 1831, à l'exception d'une disposition sur laquelle je vais revenir dans un moment, parce que c'est important. Globalement, nos dispositions n'ont pas changé. Mais pourtant, en Belgique, la constitution, on la change tout le temps pour changer d'autres choses qui ont trait au fonctionnement des institutions. Donc, je crois qu'il ne faut pas avoir de tabou. Il faut pouvoir remettre cette question sur la table. Et nous l'avons fait pour une seule chose qui est assez remarquable que pour être mentionnée dans le cadre de cette émission, je pense, c'est-à-dire qu'on a modifié la constitution en 1993 pour permettre aux philosophies d'être financées. Et donc, nous avons un dispositif qui finance non seulement les cultes, mais les philosophies non confessionnelles. C'est ce qu'on appelle en Belgique la laïcité organisée qui bénéficie aussi d'un soutien des pouvoirs publics. Et là, c'est vraiment, je crois aussi, parce que la laïcité, c'est-à-dire finalement le monde des agnostiques, des incroyants, des athées, était très bien représenté au niveau politique. Et donc, ce mouvement a justement réussi à ouvrir le système, à le faire bouger pour permettre à ces organisations de bénéficier aussi d'un financement. Alors, vous parlez d'une disposition dont vous alliez dans la constitution. C'est celle-là, précisément. C'est cette article 281 qui, depuis février 1831, dit que les salaires des ministres des cultes sont payés par l'État. Depuis 1993, elle dit également que les salaires des délégués qui offrent une assistance selon une conception philosophique non confessionnelle sont également payés par l'État. Et ça, c'est assez unique au monde. Donc, à un certain moment, ce système a pu se montrer flexible. Il a pu s'adapter au fait qu'il y avait désormais une communauté importante d'incroyants et qui avait droit à un soutien pour l'organisation série de passages, pour l'organisation des aumôneries dans les prisons, etc. Donc, ça, elle a pu le faire. Par contre, accommoder la diversité convictionnelle, on a encore beaucoup plus de difficultés. Donc, pour résumer un petit peu pour ceux qui écoutaient distraitement, il y a la possibilité de financement. Il existe une possibilité de financement pour les cultes en Belgique depuis la fondation du pays. Le financement, c'est pour les salaires des prêtres, c'est pour le fonctionnement des églises et c'est même pour d'autres choses comme l'enseignement de la religion, de la religion dans les écoles. Pour les aumôneries, vous en parliez à l'instant. Il y a une disposition dans la Constitution qui oblige l'État à financer les cultes, mais il n'y a pas de législation qui précise les conditions dans lesquelles tout ça va être appliqué. Voilà un excellent résumé. Merci beaucoup. Mais alors, on va continuer parce que la question qui se pose, c'est maintenant à supposer qu'on veuille faire financer l'église arménienne par l'État comme les autres cultes en Belgique. Comment procéder ? Est-ce qu'on doit attendre un changement de la législation ou est-ce qu'il faut agir déjà maintenant ? Alors, il y a grosso modo deux voies qui se proposent à l'église arménienne, sauf à attendre effectivement au bras croisé que quelque chose évolue. La première voie, c'est de se dire voilà, je vais écrire au ministre de la Justice, demander à être reçu et expliquer pourquoi je mérite d'être financé en espérant effectivement que le ministre de la Justice écoute la requête d'une oreille favorable. Alors, il y a cette petite disposition, cette possibilité qui permet au ministre de la Justice de soutenir un culte sans vraiment le reconnaître. C'est-à-dire qu'on peut prévoir au budget de la Justice un espèce de subsides temporaires pour aider l'église à se structurer. Ce sont des subsides dont le bouddhisme et l'hindouisme bénéficient actuellement. Ils ne sont pas reconnus, mais ils reçoivent chaque année une somme d'argent justement pour déjà les soutenir en attendant qu'ils aient accès au financement complet. Donc, on peut faire ça et espérer effectivement de recevoir un petit subside du ministre de la Justice. Ou bien on peut se dire finalement, ou après avoir fait cette démarche, si elle n'aboutit à rien, on peut imaginer la voie judiciaire. Puisque je vous dis, il y a une première décision, une jurisprudence sur laquelle s'appuie à Strasbourg. On peut contester en justice le système belge et précisément l'inexistence d'une procédure de reconnaissance claire. Ou encore, je dirais, on peut éventuellement envisager que l'église arménienne se rattache à un culte déjà reconnu pour à ce moment-là bénéficier rapidement d'un paiement des salaires des ministres des cultes et un soutien au lieu de culte. Et en l'occurrence, par exemple, avoir une entente avec l'organe représentatif du culte orthodoxe pour être reconnu en tant que branche de l'orthodoxie, même si évidemment, c'est un peu tiré sur la réalité religieuse des choses. Oui, oui, l'église arménienne est géographiquement du côté des orthodoxes, mais c'est une église totalement, tout à fait indépendante comme chacun sait. Mais alors, si j'ai bien compris, si on demande la reconnaissance directement, ça risque de prendre très longtemps. Si l'église arménienne demande sa reconnaissance directement en tant qu'église indépendante auprès du ministre, ça peut être compliqué. Pourquoi? Ça va durer très longtemps et il n'y a aucune garantie de résultat parce que, comme je vous le disais, les pouvoirs publics ne souhaitent pas élargir le nombre de cultes reconnus et en particulier pas le nombre de cultes chrétiens. Maintenant, je pense qu'il y a une autre possibilité qui, dont la survenance ne dépend pas, ne dépend ni de vous, ni de moi. C'est que le système change pour d'autres raisons et en particulier dans le cadre d'une réforme de l'État. Actuellement, c'est vrai que c'est assez compliqué. Il y a le niveau fédéral qui intervient pour reconnaître les cultes, pour payer les salaires et puis les régions qui interviennent pour reconnaître les lieux de culte et pour organiser leur financement. Peut-être que demain, on assistera à une simplification de ce système. On ne peut pas exclure que les différentes régions aient envie de gérer elles-mêmes l'entièreté de la matière, ce qui pourrait être cohérent. Donc, peut-être que demain, ce sera une toute nouvelle législation à laquelle les nouvelles communautés religieuses seront confrontées. Est-ce qu'il y a des raisons de penser qu'il va y avoir un changement du système? Est-ce qu'il y a un débat en cours au sein des institutions politiques? Alors, il n'y a pas vraiment de débat sur cette question. Il y a des signaux qui nous viennent de Flandre qui me font croire qu'effectivement, du côté flamand, on aimerait bien jouir de plus d'autonomie pour organiser notamment le culte islamique. Maintenant, je dirais administrativement, les cultes sont rattachés au département de la justice et il y a là clairement un débat beaucoup plus ouvert côté flamand en vue d'une possible régionalisation de la justice. Dans la plupart des États fédéraux, la justice est une compétence partagée au niveau fédéral, au niveau des entités fédérées. Donc, j'imagine que dans le cadre d'une prochaine réforme de l'État, le dossier de la justice sera sur la table et une régionalisation partielle de la justice pourrait emporter celle des cultes, même si ce n'est pas le sujet principal. On a déjà vu ce genre de choses se produire en Belgique. On transfère un paquet de compétences aux régions et puis on se rend compte qu'avec elles, on a forcément transféré autre chose. Ça s'est passé justement pour les lieux de culte jusqu'en 2001. Tout se trouve au niveau du fédéral. Et puis en 2001, on va transférer tout ce qui concerne l'organisation des communes aux régions. Et puis on se rend compte qu'avec les communes, on a transféré des lieux de culte parce qu'eux sont implantés au niveau communal. Donc voilà, une évolution de ce type, à mon avis, n'est pas du tout exclue dans les années qui viennent. Alors, effectivement, ce sont des communes qui gèrent les lieux de culte. C'est beaucoup plus compliqué que cela. Historiquement, ce sont les communes, je vous dis ça très brièvement, les communes s'occupaient des fabriques d'églises, des lieux de culte, du culte catholique et également des autres cultes du XIXe siècle. Au XXe siècle, quand on a reconnu l'orthodoxie d'Islam, on s'est dit on ne doit pas faire dépendre ça du niveau communal parce qu'il y a une concentration des populations chrétiennes, orthodoxes, musulmanes. Ce ne serait pas juste que certaines communes doivent en plus prendre ça en charge et pas d'autres. Et donc, on a mis ça au niveau provincial. Et puis alors, maintenant, à Bruxelles, on a décidé pour simplifier qu'on allait tout faire remonter à la région. Donc, pour tout vous dire, si vous êtes à Bruxelles, votre interlocuteur à côté du fédéral, ce sera la région. Si vous êtes en Flandre, ce sera la province. Et si vous êtes en Wallonie aussi, ce sera la province. D'accord. Donc, les communes n'ont pas de rôle direct. Elles ont un rôle direct en Wallonie et en Flandre pour les cultes du XIXe siècle. Voilà, mais on est sur quelque chose de relativement technique. J'aurais pas dû poser la question. Voilà, on se préoccuper dans un stade ultérieur. Si vous réussissez dans votre démarche et que vous me réinvitez pour expliquer comment dorénavant le financement de l'église arménienne va se déployer, à ce moment-là, je pourrais vous détailler les différences des législations dans chaque région. Et alors, dernière question qui est un peu, je crois qu'on a fait le tour du sujet sur les démarches que l'église arménienne pourrait réaliser, en tout cas, je pense, dans le cadre de cette émission et on va souhaiter qu'elle le fasse. Je me posais la question des liens avec une hiérarchie qui se trouve à l'étranger. L'église catholique a une hiérarchie dont le sommet est à Rome. L'église arménienne a une hiérarchie dont le sommet est à Etchmiadzin, en Arménie. On a une sorte de pape qui s'appelle un catholikos chez les Arméniens. Donc, est-ce que cette hiérarchie est reconnue? Est-ce qu'on en tient compte ou est-ce que quelle est l'instance finalement qui va être reconnue au sein de l'église catholique, par exemple? Quelle est l'instance qui est reconnue? Alors, la question de l'influence étrangère est une question qui préoccupe beaucoup le politique en Belgique actuellement, mais c'est plutôt en lien évidemment avec l'islam et une éventuelle ingérence d'états étrangers. S'agissant de la hiérarchie religieuse, impérativement, l'organe représentatif reconnu sera belge. Et on a un exemple, par exemple, qui est celui de l'église anglicane, qui pendant de longues années n'a pas eu de représentation en Belgique. Et donc, quand on se demandait quel chaplain de l'église anglicane va-t-on payer? Ça, c'était au 19e siècle. Eh bien, on passait par le ministre, le ministère des affaires étrangères. On demandait au foray un office à Londres, qui était le chaplain incompétent. Et puis, à un moment donné, on s'est dit ça ne va pas. Parce que c'est le roi d'Angleterre ou la reine d'Angleterre qui était en tout cas le chef de l'église anglicane, se trouvait effectivement en Grande-Bretagne. Et puis, on s'est dit ça ne va pas. Et on a créé donc en Belgique un comité central du culte anglican, qui est formellement dorénavant l'organe représentatif du culte anglican en Belgique. Il en va de même pour toutes les églises. Alors, il faut bien sûr souligner que cet organe représentatif ne s'occupe que de la gestion de ce qu'on appelle le temporel, c'est à dire des aspects matériels du culte. Donc, il n'y a pas d'obstacle au nom de la liberté de culte à ce qu'une hiérarchie religieuse soit conservée. Par contre, pour ce qui est de l'organe qui va, par exemple, vérifier les budgets et les comptes des lieux de culte, ce sera impérativement une structure belge. Oui, Caroline Sagesser, je vous remercie beaucoup de nous avoir aidé à éclaircir cette question passionnante et non seulement passionnante, mais intéressante et, je pense, importante du point de vue des Arméniens en Belgique et du point de vue de ces autres cultes qui ne sont pas reconnus, qui doivent trouver leur place ici dans le pays. Chers auditeurs, j'espère que cet entretien avec Caroline Sagesser du CRISP vous aura intéressé et je vous donne rendez-vous pour la prochaine émission d'Arméno Lobby. Je vous remercie pour cette invitation et pour cet entretien. Arméno Lobby, votre émission avec Nicolas Tavitian et ses invités, tous les lundis à 15 heures et les mercredis à 11 heures. Retrouvez également tous les numéros d'Arméno Lobby en podcast sur l'application Belga High pour smartphone. Pour ce faire, rendez-vous sur Play Store ou Apple Store et téléchargez gratuitement l'application Belga High pour votre téléphone Android ou iPhone.

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