black friday sale

Big christmas sale

Premium Access 35% OFF

Home Page
cover of Armenolobby & Georges Dallemagne
Armenolobby & Georges Dallemagne

Armenolobby & Georges Dallemagne

Belga HayBelga Hay

0 followers

00:00-51:09

Belgahay vous propose une série d'émissions sur le lobbying, le travail politique que font les organisations arméniennes, ce qu'elles essaient de faire, leurs succès, leurs échecs... Nicolas Tavitian est l'ancien président du Comité des Arméniens de Belgique. Il a longtemps travaillé comme lobbyiste justement, pour des organisations et des mouvements de la société civil, pour faire entendre leur voix auprès des institutions européennes. Jusqu'à 2020 il était même le directeur européen de l'orga

Audio hosting, extended storage and much more

AI Mastering

Transcription

Arméne Lobby, votre nouvelle émission avec Nicolas Tavitian et ses invités, tous les lundis à 15h et les mercredis à 11h. Belgar High Belgar High vous propose à partir d'aujourd'hui une émission sur le lobbying des Arméniens. Comment peut-on participer aux décisions publiques, faire entendre sa voix, avoir un impact ? Pour en parler, nous allons nous entretenir dans quelques instants avec l'une des personnalités politiques belges les plus actives sur le dossier arménien. Je crois que nous avons beaucoup à apprendre de lui. Mais avant cela, un mot sur le lobbying. Pourquoi en parler maintenant ? C'est que notre capacité de convaincre les autorités du bien fondé de nos préoccupations, nos préoccupations à nous, les Arméniens, est un problème qui se pose avec une acuité particulière dans notre cas, dans le cas des Arméniens. Je crois que tous ceux qui nous écoutent connaissent la situation critique dans laquelle se trouvent actuellement l'Arménie et les Arméniens du Karabakh. Il existe peu de pays dans le monde qui soient menacés dans leur existence même comme le sont l'Arménie et le Karabakh. Alors est-il légitime pour les Européens d'origine arménienne de chercher à participer aux décisions publiques ? Bien évidemment, oui. C'est le principe même de la démocratie que de participer au processus de décision. Or ces trois dernières années se sont commises aux portes de l'Europe des atrocités, des crimes de guerre et des crimes contre la paix. Je ne parle pas ici de l'Ukraine, vous l'aurez compris, je parle du Caucase du Sud et plus précisément bien sûr de l'Arménie, de l'Azerbaïdjan et du Karabakh. Ces crimes ont été commis par deux pays qui ont déjà commis tous deux un nettoyage ethnique de grande envergure au débat des Arméniens. En 100 ans, entre 1895 et 1995, ils sont parvenus à supprimer presque toute la population arménienne de leur territoire respectif, soit près de 3 millions de personnes. En 2020 encore, tous les Arméniens ont dû fuir les territoires nouvellement conquis par l'Azerbaïdjan. Et ça, on n'en a pas parlé en Europe. Et en décembre 2022, l'Azerbaïdjan a commencé un blocus du Nakourno-Karabakh qui vise à affamer et à chasser sa population. Or, ce qui nous a frappé, c'est que lors de la guerre du Karabakh en 2020, la Belgique n'a pas réagi. Le reste de l'Europe non plus d'ailleurs, à de très rares exceptions près. Deux années plus tard, en septembre 2020, l'Arménie est attaquée directement par l'Azerbaïdjan. La Belgique ne réagit pas davantage. Elle n'envoie pas d'aide. Elle n'émet pas de déclaration en faveur de l'Arménie ou de son intégrité territoriale et elle n'évoque pas davantage ces questions au sein des enceintes internationales dont elle est membre, comme l'Union Européenne, le Conseil de l'Europe ou encore les Nations Unies. Enfin, en ce moment même, comme vous le savez, la population du Karabakh est soumise à un blocus complet de la part de l'Azerbaïdjan. Avez-vous vu ou entendu protester notre gouvernement ? Non, pas un mot. Du tapage dans la presse peut-être ? Pas davantage. L'Europe, c'est vrai, a fait l'une ou l'autre timide déclaration. Mais, comme on dit, c'est trop peu et c'est trop tard et l'Europe donne l'impression de faire le service minimum et d'être déterminée à ne pas aller plus loin. Comment est-ce que tout cela est possible ? Comment se peut-il que notre pays, la Belgique, puisse être à ce point indifférente lorsque se commettent de telles injustices, de telles violations du droit, de la paix, de la sécurité de l'Europe ? Enfin, des violations contre tout ce que l'Europe et la Belgique condamnent si violemment. Notre pays et l'Alliance occidentale, donc l'OTAN, ne sont-ils pas les défenseurs de la démocratie et du droit international contre les dictatures belliqueuses ? N'est-ce pas au nom de la défense du faible contre le fort, de la démocratie et des droits de l'homme que nous avons lancé des mesures de rétorsion sans précédent contre, par exemple, la Russie ? Comment expliquer cette différence de traitement ? On peut bien évidemment s'indigner du deux poids deux mesures, de l'indifférence ou de l'hypocrisie de la Belgique s'agissant de ce problème. Mais ce n'est pas le principal sujet de cette émission. Dans cette émission et dans celles qui suivront, je voudrais vous inviter à examiner plutôt et surtout comment nous pourrions résoudre ce problème, comment transformer cette indignation, ce désespoir en action efficace. Il faut pour cela être prêt à nous remettre en question et à remettre en question quelques habitudes de pensée et d'action. Pour nous aider à réfléchir, nous allons inviter des personnes et des personnalités qui sont impliquées dans les questions qui nous préoccupent. Elles nous diront comment elles envisagent ces questions, donc quelle a été leur action et quelles stratégies elles nous proposeront. Je voudrais souligner tout d'abord que le problème dont nous parlons n'est pas nouveau. Dans les années 90 du XIXe siècle, l'Europe s'est appliquée à ne jamais venir au secours des Arméniens, à de très rares et marginales exceptions près. Nous ferons éventuellement un historique de l'inaction européenne un autre jour. En tout cas, le contraste est frappant entre la relative sympathie de nombreux dirigeants et du public européen envers la cause des Arméniens et leur capacité à les trahir chaque fois que leur sort en dépense. Comment expliquer cette posture d'indifférence ou de complicité face à un conflit qui, sous une forme ou sous une autre, dure depuis plus de cent ans, à l'égard d'un conflit qui oppose un petit peuple dont la taille n'a cessé de se réduire sous les coups de deux États dictatoriaux et impérialistes, la Turquie et l'Azerbaïdjan ? La passivité de l'Europe à l'égard du conflit et de l'épuration ethnique en œuvre depuis plus d'un siècle est d'autant plus remarquable qu'elle est en contradiction complète avec les valeurs centrales de l'Occident depuis la Deuxième Guerre mondiale. Ces valeurs sont, par exemple, le refus de la guerre, le refus des nettoyages ethniques, la condamnation sans appel des génocides, l'invocation de la mémoire comme facteur de progrès, la responsabilité de protéger et, d'une manière plus générale, l'ensemble du corpus du droit international des droits de l'homme. Il semblerait que toutes ces valeurs, toujours ressassées, ne s'appliquent plus dès lors qu'il s'agit des Arméniens. La constance de la position de l'Europe, d'une manière générale, mérite d'être remarquée. Il n'est pas inutile d'essayer de l'expliquer. Elle pose en tout cas cette question aux Arméniens d'Europe. Avant nous agir suffisamment pour alerter nos gouvernements, pour les informer, pour leur expliquer et pour les sensibiliser, nous y sommes-nous pris comme il faut pour obtenir la mobilisation politique qui s'impose ? Est-il possible de faire jouer à l'Europe et à la Belgique un rôle constructif dans ce cadre-là ? Et si effectivement c'est possible, alors quel rôle la Belgique et l'Europe peuvent-ils jouer en la matière ? En un mot, il faut être capable de se remettre en question. C'est cette problématique que je voudrais explorer avec vous dans cette émission. Nous allons explorer ensemble ce que c'est que le lobbying, en quoi le concept peut s'appliquer aux communautés arméniennes et aux questions qui nous préoccupent, quels objectifs il a poursuivi ou devrait poursuivre et comment il pourrait être mené efficacement. La démarche que je vous propose est d'interroger cette expérience pour comprendre comment faire concorder les politiques européennes et la survie de l'Arménie. Il ne s'agit pas, vous l'avez compris, de s'indigner plus fort ou de crier au scandale, mais de nous interroger sur ce qu'il faudrait faire pour que la situation change. Et s'interroger, nous le ferons avec nos amis de Belgique et d'ailleurs, et ce sera une conversation ouverte. Alors, on pourrait s'étonner, c'est vrai, qu'un sujet comme le lobbying soit abordé de manière ouverte dans une émission de radio publique que tous peuvent écouter. Le lobbying est souvent associé, c'est vrai, à des activités secrètes, mais ses a priori ne s'appliquent pas au lobby sur les questions qui nous intéressent. Ce que cherchent les Arméniens, c'est bien que la Belgique et l'Europe agissent selon leurs propres valeurs et qu'elles contribuent à créer au moins dans le voisinage de l'Arménie une Europe juste, pacifique, stable et prospère. Il n'y a là aucune motivation inavouable et il est donc parfaitement justifié de parler publiquement de ce que les Arméniens attendent des politiques belges et européennes et de la manière dont ils souhaitent l'obtenir. La raison pour laquelle il est utile, en revanche, de parler ensemble publiquement et ouvertement, c'est que la mobilisation des Arméniens nous concerne tous. Nous aurons besoin, nous avons besoin des efforts de chacun pour atteindre nos objectifs, mais surtout nous avons besoin des débats entre nous sur les objectifs à poursuivre et sur les moyens de les obtenir. C'est ce débat que je voudrais encourager et ouvrir avec vous aujourd'hui et dans les émissions qui suivront. En résumé, nous sommes donc engagés dans une expérience unique à une échelle historique. Les Arméniens sont une petite nation menacée de disparaître et qui, depuis cent ans, disparaît en effet peu à peu. Notre survie dépend de nous. Elle dépend d'abord de la capacité de l'état arménien à s'organiser, à se défendre et à forger des alliances. Mais l'Arménie reste et restera un petit état. Même si on l'imagine demain prospère, organisée, efficace et bien dirigée, elle restera petite. Elle dépendra donc aussi de la capacité de sa diaspora à se faire entendre et à peser dans le monde. La diaspora doit donc d'urgence apprendre, elle aussi, à jouer son rôle efficacement partout où elle est présente. L'indifférence et l'inaction dont le monde a fait preuve au cours des cent dernières années est incompréhensible, mais c'est avant tout à nous-mêmes que nous devons reprocher de ne pas avoir été capables de le mobiliser efficacement. Nous partons du principe qu'il n'y a pas de fatalité. Si nous n'avons pas réussi à nous faire entendre, il faut d'abord en mettre en question ce que les Arméniens eux-mêmes ont fait ou n'ont pas fait pour alerter nos amis. Au cours des programmes qui suivront, nous allons interviewer les acteurs de l'action politique en ce qui concerne les Arméniens et des experts qui nous aideront à comprendre ce qui se passe en coulisses pour essayer de comprendre les forces qui forment le débat en Belgique et parfois en Europe. Nous nous poserons essentiellement trois questions. La première, c'est quel est le problème que nous cherchons à résoudre ? En décembre, par exemple, c'était le blocus de l'Azar. En septembre, il y a eu l'attaque du sud de l'Arménie. En 2020, c'était l'attaque de l'Azar et cette guerre dévastatrice. En un mot, il faut commencer par savoir quel problème nous cherchons à résoudre. Il semblerait que l'urgence en ce moment, c'est la vulnérabilité de l'Arménie, le risque d'une nouvelle guerre. Quel qu'il soit, il faut d'abord formuler ce problème, ce danger. La deuxième question à se poser, c'est qui souhaitons-nous mobiliser et que peuvent-ils faire par rapport à ce problème ? Si nous nous adressons au gouvernement belge, par exemple, qu'attendons-nous de lui ? Au-delà de la sympathie des déclarations que peut faire le gouvernement belge, c'est à nous de nous poser cette question. La Belgique ne va évidemment pas envoyer seuls des troupes pour défendre l'Arménie. Alors que peut-elle faire utilement, concrètement, pour contribuer à résoudre le problème ? Une fois que nous savons quelles actions nous espérons susciter, il faut ensuite nous demander bien évidemment quels moyens allons-nous mettre en œuvre pour arriver à un résultat ? A qui faut-il parler ? Quelle information partager ? Comment sensibiliser les décideurs, l'opinion ? Quels arguments présenter ? Voilà. Donc ces trois questions sont les trois questions qui seront au centre de nos conversations avec nos interlocuteurs et nous inviterons chacun de nos auditeurs à se les poser également. Et peu à peu, nous allons ouvrir le débat entre nous également sur la base de l'expérience de nos interlocuteurs. Alors, notre invité aujourd'hui, c'est Georges d'Allemagne. Georges d'Allemagne, comme chacun, c'est un membre de la Chambre des représentants, un parlementaire en Belgique, et il est député depuis 2007. Avant cela, il avait également été sénateur pendant quelques années. Mais à la base, la profession de Georges d'Allemagne, c'est médecin. Donc il a travaillé comme médecin et il a travaillé comme médecin notamment au sein de l'organisation Médecins sans frontières à partir des années 1880 et il a même été directeur des opérations de Médecins sans frontières Belgique. Et c'est d'ailleurs en tant qu'envoyé de Médecins sans frontières que Georges découvre l'Arménie et le Karabakh. A quel moment ? Et bien à partir de 1988 puisqu'en 1988, un terrible tremblement de terre a dévasté une partie de l'Arménie autour de la ville de Gyumri. Et donc Médecins sans frontières a envoyé des équipes pour aider à sauver les survivants et à s'occuper de la population locale et Georges d'Allemagne donc en était. En tant que député, Georges est de toutes les causes. Il défend en particulier les minorités. On le voit sur tous les dossiers. Il lutte contre l'intolérance. Il lutte contre la guerre, contre le radicalisme pour la laïcité. Il est très actif sur les questions des conflits qui entourent l'Europe et notamment l'Ukraine et le Karabakh. De manière infatigable, il est aux côtés des Arméniens en particulier et ce depuis des années, donc depuis 30 ans. Lorsque la guerre éclate au Karabakh en 2020, il se rend sur place et à son retour il dénonce l'inaction du gouvernement belge et il est le premier à demander que le Parlement au moins condamne l'offensive lancée par l'Azerbaïdjan et la Turquie ainsi que les crimes dont ces deux pays se sont rendus responsables. En résumé, Georges est l'une de ces rares et précieuses personnes qui sont des élus et qui sont entièrement dévouées aux grandes causes et qui font tout pour utiliser leur propre influence et leur audience au service de ces causes. Avant de nous entretenir avec Georges Dallemagne, cependant, je voudrais vous faire entendre un petit extrait. C'est une intervention qu'il a faite en novembre 2020, donc il y a maintenant plus de deux ans. Ce n'était ni la première ni la dernière de cette intervention puisqu'il était intervenu sur ce sujet à de nombreuses reprises. Je vous invite à l'écouter. Monsieur le ministre, j'étais au Nagorno-Karabakh il y a encore une semaine. J'ai vu l'offensive azeri, j'ai vu l'utilisation de drones, j'ai vu l'utilisation d'armes à sous munitions, j'ai vu le bain de sang. J'ai vu que les Arméniens, lâchés par tout le monde, lâchés par tout le monde, il faut le répéter, étaient seuls face à cette barbarie. Il n'y a pas d'autre mot quand on utilise des terroristes qui viennent de Syrie. Ils ont dû effectivement capituler. Vous vous réjouissez de ce ciel-feu, je me réjouis effectivement de la fin du bain de sang, mais on ne peut pas accepter cette utilisation de la force. On ne peut pas accepter que la loi du plus fort prévale dans un pays qui était la seule démocratie de cette région. On ne peut pas accepter qu'un allié au sein de l'OTAN utilise des terroristes, utilise des armes interdites pour mener une guerre dans un pays tiers. On ne peut pas accepter non plus aussi ce corridor qu'il crée dans le Nakhichevan, entre le Nakhichevan et l'Azerbaïdjan, dont vous vous félicitez, et qui fragilise encore plus l'Arménie, qui supprime la frontière qu'elle avait avec l'Iran, qui était son seul allié dans la région, et qui crée un corridor à travers lequel Erdogan pourra construire son grand rêve néo-otoman avec toutes les républiques turcophones de ce côté-là, et qui surtout mettra la main sur le pipeline en provenance de la mer Kaskienne. Je pense qu'il ne faut plus accepter ce genre de violence à nos portes, et je ne vous ai pas entendu non plus sur l'aide humanitaire que réclame l'Arménie depuis des semaines, depuis des semaines, pour ses blessés, pour ses réfugiés. Nous ne pouvons pas non plus laisser la Russie seule. Vous dites que le groupe de Minsk sera sollicité. Le groupe de Minsk est en état de coma dépassé. Il n'a pas été sollicité. Il est temps qu'il y ait là, sur place aussi, des observateurs européens, des observateurs de l'OSCE. Voilà donc pour cette intervention. Alors, cher Georges, merci d'être avec nous aujourd'hui. Je voudrais vous demander tout d'abord, vous poser une question à propos de cette décoration que vous avez reçue tout récemment. Vous l'avez reçue, donc, des mains de l'ambassadrice d'Arménie. C'est la médaille de Mekitargoch, qui est bien connue en Arménie. Pouvez-vous nous parler de la cérémonie, de la décoration et du travail qui vous a valu cette expression de reconnaissance ? En réalité, c'était la troisième fois que j'étais honoré et décoré par l'Arménie, en tout cas pour un travail effectué en Arménie. La première fois, c'était à l'époque soviétique, au moment du tremblement de terre, par chez Barnaté, pour le travail que j'avais coordonné, le travail humanitaire pour les victimes de ce tremblement de terre avec le ministère de la Santé arménien. La deuxième fois, c'était il y a quelques années. C'était aussi parce que j'avais continué à travailler beaucoup avec les Arméniens pour l'Arménie. Et puis là, effectivement, cela a couronné, encore une fois, et notamment l'action politique de ces dernières années, notamment la guerre de 2020 dans l'Artsakh et la guerre de septembre 2022, où j'étais de nouveau retourné là-bas, voir les dégâts de ce conflit. Donc, c'est un moment où c'est clair qu'on parle de l'efficacité de l'action politique à ce moment-là. D'autres parlementaires belges étaient là également, avaient aussi été honorés. Ce qui est frappant, c'est que l'Arménie a beaucoup d'amis, mais que pour autant, l'action politique reste effectivement assez frustrante, en tout cas en Belgique, parce qu'elle a finalement peu de résultats. Oui, elle continue à développer. Donc l'action politique, disiez-vous, a eu peu de résultats. Votre action politique, celle des autres parlementaires dont vous parliez, qu'est-ce que vous avez essayé d'obtenir et que la Belgique n'a pas fait ? Ou qu'est-ce que la Belgique a fait ou pas fait, d'ailleurs ? Disons que, quand je dis qu'elle a peu de résultats, il y a un problème qui est indépendant de l'Arménie. Ce que je vois, moi, pour traiter toute une série de dossiers internationaux, c'est aujourd'hui une faiblesse de la diplomatie belge depuis un certain temps, je dirais, où c'est un pays qui se concentre beaucoup sur ses problèmes internes, ses problèmes logistiques, qui consacre moins d'attention aux questions internationales et qui a plutôt tendance à suivre le mainstream au niveau international, à vérifier quelles sont les positions de ses alliés, de ses partenaires européens, de ses voisins et à s'inscrire alors dans ce flux-là, mais toujours avec un temps de retard. En général, et toujours mais au vote chez, c'est-à-dire sans s'être particulièrement en point sur certaines positions politiques. Donc ça, c'est un contexte qu'il faut connaître, contre lequel je me bat depuis longtemps, parce que la Belgique a eu dans le passé une attitude tout à fait différente. Elle avait vocation contrairement à être un peu un leader dans certains domaines. Je rappelle toujours que nous sommes le siège de toute une série d'organisations internationales et non seulement le siège, mais que nous sommes parmi les pays fondateurs de ces organisations internationales et que nous avons pu peser dans certaines questions et notamment dans les rapports Est-Ouest où la Belgique a pu peser fortement. Donc là, c'est le contexte. Sur l'Arménie en particulier, c'est vrai que c'est le sentiment à la fois d'un pays pour lequel il y a une image tout à fait sympathique, amicale. Les Arméniens sont bien reçus en général. On les crédite du fait qu'en fait, ils sont un peu une projection non seulement de l'Europe, mais peut-être presque de la vieille Europe. C'est-à-dire qu'on sent des affinités assez fortes finalement culturellement avec l'Arménie. La difficulté, c'est que pour beaucoup de gens, c'est un pays qui affecte peu finalement et notre économie et notre sécurité, ni dans un sens ni dans un autre et que donc d'une certaine manière, ce serait un peu une tragédie sans importance. C'est un peu ça le sentiment que j'ai depuis longtemps et qu'on n'imagine pas ici en Belgique que finalement les problèmes existentiels que peut rencontrer l'Arménie pourraient en fait nous affecter nous beaucoup plus qu'on l'imagine. Parce qu'en réalité, il y a là encore une fois cette projection finalement de l'Europe, même de cette vieille Europe au sens culturel du terme. Et cette disparition ou cette fragilisation de cette Arménie, les coups qui lui sont portés sont finalement je pense aussi des coups qui nous sont portés à nous. En tout cas, c'est en tout cas ce que j'essaye de faire comprendre ici aux responsables politiques. Alors on a eu certaines victoires, mais ça s'est fait avec beaucoup de difficultés. Moi je me souviens, je me suis beaucoup battu sur la reconnaissance du génocide arménien. On a finalement voté une résolution qui était pour moi assez faible. Enfin voilà, il y a quand même eu une déclaration du Premier ministre, mais ça a été un combat que je n'avais pas imaginé devoir mener aussi durement au sein du Parlement belge. Il y a eu des victoires comme cela, mais finalement on aurait pu faire beaucoup plus, beaucoup mieux. Et certains partis politiques qui se disent proches de la communauté arménienne n'ont pas nécessairement été très courageux dans ces combats-là. Donc vous dites que la Belgique a été en retrait, a tendance à suivre ses partenaires européens plutôt que de formuler des propositions ou être à l'initiative. A supposer que la Belgique ou un gouvernement belge, un Premier ministre, un ministre des affaires étrangères, veuillent contribuer, veuillent prendre le leadership ou un certain leadership sur ces questions-là. La Belgique reste un petit pays avec des moyens limités par rapport à certains de ses voisins. Qu'est-ce que la Belgique pourrait réaliser ? Quels pourraient être les objectifs politiques ? Alors c'est là qu'on voit un peu, du côté belge, je pense qu'on peut faire beaucoup plus. J'ai le coutume de dire que ce n'est pas un si petit pays que cela. Et notamment c'est un pays qui est stratégique au cœur de l'Europe. Et donc c'est un pays qui finalement a une certaine visibilité qui est plus forte que sa démographie. Et aussi en raison de son patrimoine politique, je veux dire. Et de sa capacité aussi à négocier. Ce qui peut parfois aussi représenter une difficulté par rapport à l'Arménie, c'est alors qu'il n'est pas toujours facile de comprendre quelle est la volonté arménienne. Et quel est l'agenda politique de l'Arménie. Et ça c'est une difficulté que je rencontre depuis longtemps. C'est-à-dire qu'on a évidemment énormément d'empathie, on condamne, on voit les dégâts, on essaye de faire en sorte qu'on en parle beaucoup plus. Mais c'est vrai que j'ai encore institué un voyage récemment en Arménie. J'ai rencontré beaucoup d'interlocuteurs politiques. Il a été assez peu question d'un agenda de revendication de l'Arménie par rapport à la Belgique, à la communauté internationale et à l'Union européenne. En dehors d'une condamnation, en dehors d'une sanction de l'Azerbaïdjan, finalement, il apparaît qu'en fonction de l'interlocuteur qu'on a, on peut avoir des divergences assez substantielles sur ce qu'on attend de l'Union européenne, sur ce qu'on attend de la Belgique en termes, par exemple, de sécurité, en termes de protection, en termes d'agenda politique. Il peut aussi y avoir des différences importantes, en tout cas plus que des nuances, entre ce que pensent les diasporas et ce que pensent les Arméniens de l'intérieur. Et donc ça, je crois que c'est vraiment un travail qui reste à réaliser. Quelles sont les relations avec l'Union européenne ? Quelles sont les demandes ? Quelles sont les condamnations ? Quelles sont les sanctions qui sont demandées ? Et alors, ça c'est une première chose, un travail de clarification. – Et c'est un travail auquel j'espère que votre interview ou d'autres interviews pourront d'ailleurs contribuer. – Oui, à ceci près qu'il ne m'appartient évidemment pas, moi, de décider ce qu'est cet agenda politique de l'Arménie, avec peut-être quand même une ou deux, je dirais, remarques, ou en tout cas des recommandations. Je pense que cet agenda doit être atteignable. Donc ça, ça me paraît important, c'est de se fixer des objectifs qui peuvent être très ambitieux mais dont on imagine qu'ils sont accessibles. Et donc voilà, je pense vraiment que c'est dans ce cadre-là que, et à la fois la diaspora arménienne, et à la fois les autorités politiques du gouvernement, du parlement arménien, devraient pouvoir communiquer un cahier de revendications qui soit accessible. Je prends souvent l'exemple de l'Ukraine. Je travaille beaucoup dans le cadre de ce conflit parce que j'estime effectivement que l'Ukraine est évidemment injustement attaquée, violée sur son territoire. Et j'ai en face de moi des responsables politiques qui sont très clairs sur ce qu'ils demandent à l'Europe. Très très clairs. Et l'adhésion à l'Union européenne, et les armements, et les condamnations, et l'arrêt des flux financiers, etc. Ils ont un agenda. Et quel que soit l'interlocuteur que je rencontre, les éléments de langage, les éléments politiques sont toujours les mêmes. L'Arménie pourrait avoir le même type d'agenda, aussi bien au niveau des sanctions, l'interruption des flux financiers, des armes pour se défendre, une condamnation verbale bien sûr ? Je crois que l'Arménie pourrait avoir effectivement un agenda politique très ferme. Alors, est-ce qu'il serait de la même nature que celui de l'Ukraine ? Il faut vérifier. Mais en tout cas, il pourrait faire toute une série de revendications dans ce domaine-là. Je prends un exemple. Chaque fois que l'Arménie est attaquée, nous recevons des images d'Arménie montrant les dégâts, montrant les victimes. La difficulté, c'est qu'il n'y a pas, par exemple, d'observateurs de l'Union européenne qui soient de manière permanente. Ils ont été là pendant quelques semaines, quelques mois. Ils vont s'en retourner. Ça, par exemple, je pense que c'est une évolution qui est assez positive. C'est d'essayer d'avoir sur le terrain des observateurs européens qui entraîneront du coup un regard plus attentif de la part de l'Union européenne et aussi probablement des réactions politiques plus substantielles de la part de l'Union européenne. Donc il y a, je pense encore une fois, un agenda politique à clarifier, un cadre de revendications à clarifier et qui devrait être porté par tous, quelles que soient les sensibilités politiques. Alors j'entends bien et on voit bien en Belgique qu'on a exactement la même chose. C'est qu'on a une démocratie qui est très vibrante en Arménie avec parfois des tensions très fortes, parfois des divergences de vues fortes. Mais je crois que ça ne devrait pas l'empêcher dans une situation aussi préoccupante pour la sécurité de l'Arménie de porter ensemble à soi les mêmes messages. Oui. Vous poussez à être encore plus concret. Donc l'une des mesures concrètement que la Belgique pourrait prendre serait d'intervenir auprès de l'Union européenne puisque c'est l'Union européenne en Europe qui a le poids éventuellement auprès de l'OTAN dans la mesure où certains problèmes pourraient être résolus par l'OTAN. Est-ce que certaines mesures pourraient être prises par la Belgique de manière unilatérale ? Est-ce qu'elle peut intervenir elle-même ? Moi je pense que la Belgique pourrait montrer plus d'adversité ne fût-ce que par des actions symboliques. Je prends un exemple qui n'est peut-être pas pertinent mais la Belgique a une grande expertise en matière de déminage. Elle va contribuer au déminage de certaines zones en Ukraine, elle va contribuer au déminage de zones un peu partout dans le monde. S'il y a des zones qui sont minées par exemple en Arménie, on pourrait très bien imaginer que la Belgique soit sollicitée sur ces questions-là. Ça ne sauverait évidemment pas la sécurité arménienne mais ça montrerait une implication directe sur les questions de sécurité en Arménie. On peut imaginer sur d'autres aspects, sur d'autres volets. On peut aussi imaginer qu'à travers la diaspora arménienne ici, à travers la société civile arménienne ici et aussi avec la société civile belge dans son ensemble, d'actions, d'observations, de rapportages ou d'actions de type humanitaire et de liens qui continuent à se tisser de manière coordonnée, de manière étroite, de telle manière qu'on puisse effectivement garder aussi ces liens humains très forts entre l'Arménie et la Belgique. Il devrait y avoir une stratégie dans ce domaine-là. Donc je crois vraiment qu'il faut élaborer toutes ces stratégies à la fois politiques, sécuritaires, humanitaires et qu'il faut encore une fois montrer qu'on a une vision claire de là où on veut aller. Oui. Maintenant, vous nous avez parlé et je vous en remercie de ce que la Belgique pourrait faire et qu'elle n'a pas encore fait. Vous nous avez dit que pour arriver à un résultat il faudrait d'abord que l'Arménie elle-même soit claire dans son message, qu'elle se coordonne avec la diaspora qui est une certaine unité dans la communication et dans l'action. Au-delà de ça, pour obtenir des résultats, pour travailler efficacement, plus efficacement avec les autorités belges, pour convaincre, pour informer, pour motiver politiquement, quelles sont vos recommandations aux institutions de la communauté arménienne de Belgique, aux organisations arméniennes qui sont présentes en Belgique et pas seulement à eux, à tous ceux qui se préoccupent de la paix, des droits de l'homme et de l'avenir du cocaïne ? Qui suis-je pour former des recommandations ? Une chose qui m'a toujours frappé, c'est que j'ai beaucoup d'amis arméniens en Belgique qui appartiennent à toute une série d'associations et d'organisations et j'ai parfois l'impression qu'ils ne se parlent pas suffisamment. Il m'est arrivé que de partir en Arménie à l'invitation d'une association sans que d'autres soient informés, sans qu'on sache exactement ce que je vais faire là-bas, sans que finalement l'information circule. Ça paraît être un élément qui pourrait être amélioré parce que ça créerait plus de force, plus de poids et donc que chacun ait sa sensibilité, que chacun ait son association, ça me paraît tout à fait légitime, que chacun ait ses propres combats. Il devrait y avoir un endroit quelque part qui réunit tout le monde et sur lequel de nouveau on se met d'accord sur les points politiques, sur lesquels on sera tous d'accord, sur un agenda sur lequel on sera tous d'accord et sur une stratégie en Belgique sur laquelle on sera tous d'accord. Ça je crois vraiment que ce n'est absolument pas une critique, au contraire ça montre la richesse du tissu associatif arménien mais je crois qu'on peut effectivement au-delà de cette richesse-là et au-delà des sensibilités de chacun, porter tout ensemble un projet politique. Une colonne vertébrale sur laquelle on est d'accord et sur laquelle on va dire tiens, sur tel élément on va plutôt aller solliciter tel responsable politique, là on va aller voir tel député, là on va créer telle action et on va mobiliser sur telle initiative. Ce genre de choses-là, alors peut-être que cela se fait mais j'ai parfois l'impression que ça me semble tout à fait insuffisant. Donc davantage de coordination, de communication entre tous les acteurs du travail politique. Entre tous les acteurs y compris j'imagine avec effectivement la représentation diplomatique ici en Belgique qui a un rôle tout à fait important ici puisqu'elle représente l'action du gouvernement arménien. Maintenant on va passer si vous voulez bien à la situation sur place dans le Caucase qui reste critique puisque le Carabao est toujours sous blocus. A l'heure où je parle, puisque le conflit est encore latent et parfois est ramené dans une situation critique. Comment est-ce que vous analysez la situation sur place vu de Belgique ou vu d'Europe ? La grande difficulté pour l'Arménie aujourd'hui c'est qu'elle ne peut vraiment compter sur personne pour sa sécurité. On l'a vu, le traité de sécurité et de coopération notamment avec la Russie n'a pas fonctionné, ne fonctionne pas puisqu'il y a ce blocus du corridor de la Chine. Je pense que les responsables politiques arméniens l'ont pour la première fois depuis novembre, depuis le dernier sommet de ce traité de coopération sur la sécurité, l'ont déclaré publiquement. C'est un constat majeur et donc aujourd'hui l'Arménie doit effectivement probablement se réorienter sur le plan stratégique et vérifier quel peut être aujourd'hui son mécanisme de protection. Elle a besoin d'un mécanisme de protection, on le sait, c'est un pays qui n'a pas énormément de ressources, qui sur le plan démographique est beaucoup plus faible que ses voisins, avec des puissances régionales qui ont tout un agenda qui n'est pas nécessairement, enfin ne fait limite l'agenda d'Arménie. Donc il s'agit de vérifier quels sont les mécanismes les plus pertinents. Je pense que c'est une question qui doit être discutée au Conseil de sécurité des Nations Unies, c'est une question qui doit être discutée avec l'Union européenne, avec l'OTAN et c'est surtout une question sur laquelle les Arméniens eux-mêmes doivent se dire quels sont finalement les mécanismes qui nécessitent de nous protéger le mieux, qui pourraient être les plus pertinents et jusqu'à quel point peut-on compter sur nos propres forces, jusqu'à quel point peut-on compter sur nos voisins et au-delà de nos voisins évidemment sur l'architecture de sécurité internationale. Voilà, moi je crois vraiment que la question, enfin la guerre en Ukraine pour moi est un basculement parce que cela montre bien qu'il y a de la part de la Russie qui a aujourd'hui une attitude qui n'est pas une attitude de protection de sécurité, qui est une attitude au contraire impériale mais qu'elle n'exerce que si... oui et qu'elle exercera dans le sens de ses propres intérêts et mon sentiment c'est qu'aujourd'hui l'intérêt de la Russie n'est pas forcément protéger l'Arménie parce que finalement l'Azerbaïdjan regorge de ressources, parce que l'Azerbaïdjan est le plus puissant sur le plan démocratique et parce que les Turcs lorment sur l'Azerbaïdjan et qu'il ne s'agit pas de faire en sorte que l'Azerbaïdjan bascule du côté turc sur le plan des liens géostratégiques. Il s'agit de vérifier quelle est la nature des liens qu'on peut avoir avec la géologie, mais au-delà effectivement qu'est-ce qu'on peut attendre de l'Union Européenne et quelle est la demande d'abord de l'Arménie à l'écart de l'Union Européenne et ça c'est important je crois vraiment. L'Union Européenne comme protégeur qui prendrait la place de la Russie ? Alors l'Union Européenne est aujourd'hui une puissance assez faible en matière de défense, on le sait. Elle est en train elle-même de faire son aggiornamento, l'Union Européenne en matière de sécurité et de défense. Je pense que ce sont des processus qui pourraient se faire de manière concomitante, c'est-à-dire qu'à la fois l'Union Européenne est en train de se rendre compte qu'elle a besoin effectivement de renforcer sa propre sécurité mais que sa propre sécurité peut passer par la sécurité de certains pays admis, certains pays qui ne sont pas très éloignés et qu'elle peut aussi avoir un rôle de puissance en matière de sécurité. Voilà donc ce sont des phénomènes je pense concomitants. Moi je travaille beaucoup sur la question de la sécurité européenne, sur la question de la défense européenne, c'est un combat que je mène depuis des années et une défense européenne n'est pas seulement une défense pour les pays de l'Union Européenne, c'est une défense qui peut aussi avoir la capacité de projection, de stabilisation, de sécurisation de pays qui sont proches de pays qui sont importants parce qu'ils sont à la frontière d'une série d'autres mondes. Mais de nouveau l'Union Européenne s'intéressera plus vite à ces questions-là s'il y a clairement une demande qui est formulée, s'il y a clairement une attente qui est formulée. L'Union Européenne est en train de sortir d'une forme de naïveté en matière de sécurité et de défense et je pense qu'on prend tout doucement conscience de la place qu'elle doit prendre en matière de sécurité, pas seulement à l'intérieur de ses frontières mais au-delà, on a vu d'ailleurs l'Union Européenne se déployer dans toute une série de pays. Un pays que je connais bien qui est le Congo, il y a eu une opération européenne il y a 20 ans qui s'est très bien déroulée. Donc l'avantage de l'Union Européenne c'est qu'elle a un agenda politique beaucoup plus soft que d'autres grandes puissances lorsqu'elle se déploie et qu'elle déploie ses capacités de défense. Alors l'agenda de l'Union Européenne ça pourrait être la sécurité au sens de la protection, contribuer à la protection de l'arménie. Est-ce que ça pourrait aussi être une contribution à la médiation avec ses voisins, avec la Turquie, avec l'Assemblée Nationale parce que le but ultime c'est la paix, c'est-à-dire la normalisation des relations avec les voisins. Est-ce que l'Union Européenne aurait un rôle dans ce cadre-là ? Oui, c'est ce qu'elle essaye de faire. Donc il y a cette initiative du président de conseil. Tout c'est de savoir quelles sont les cartes qu'a l'Union Européenne dans son jeu pour pouvoir servir de médiateur. Le problème de l'Union Européenne aujourd'hui c'est qu'elle n'est pas toujours considérée comme une puissance qui impacte sur l'agenda international et qui a la capacité finalement, le cas échéant, de montrer les dents si véritablement il y a un basculement vers un conflit, vers une tension tout à fait inadmissible. Donc aujourd'hui c'est ça. Est-ce que l'Union Européenne est considérée comme un interlocuteur crédible ? Oui, dans un certain sens parce qu'elle est considérée comme un espace de liberté, de démocratie, de respect du droit, de respect des conventions, de respect de la parole donnée. Tout ça c'est très bien. Mais aussi, encore une fois, c'est malheureusement une puissance faible sur le plan de sa capacité à restaurer la sécurité, à imposer la sécurité. Donc c'est là qu'elle doit travailler. Mais je pense que l'Union Européenne, j'imagine, enfin je vois les initiatives, on peut déplorer leur manque d'impact mais elle ne reste pas à des bras ballants. Elle est faible en raison de ce que je viens de décrire. Elle est parfois faible aussi parce qu'on n'exige peut-être pas assez d'elle. On n'attend pas finalement sur ces questions de sécurité. On attend les Russes, on attend l'OTAN, on attend les Africains, mais on ne l'attend pas elle. Je pense qu'il faudrait aussi, de ce côté-là, peut-être, effectivement, avoir des négligences à l'égard de l'Union Européenne étant donné ses prétentions politiques. On a parlé jusqu'à maintenant des questions politiques d'abord. Je voudrais parler un tout petit peu des médias, pour terminer, puisqu'on a constaté de manière concomitante que, d'une part, il y a eu très peu d'action politique au niveau de l'Union Européenne ou de la Belgique pour la paix dans le Caucase ou pour dénoncer les attaques, les crimes et ainsi de suite, tout ce dont nous avons parlé aujourd'hui. Mais par ailleurs, les médias aussi en ont très peu parlé. Ils ont très peu parlé de la situation et souvent, en Belgique et à l'étranger, lorsqu'ils en ont parlé, c'était de manière assez ambigüe, c'est-à-dire sans nommer... On a parlé, pendant la guerre de 2020, on a parlé d'affrontements entre Arméniens et Azéries, au lieu de parler d'une attaque, puisqu'on savait bien, dès le début, d'où venait l'offensive. Les médias ont très peu parlé de la situation. Comment est-ce que vous analysez cet état de fait, qui, encore une fois, n'est pas spécifique à la Belgique, c'est vrai dans la plupart des pays étrangers, peut-être avec l'exception de la France. Comment est-ce que vous voulez l'expliquer ? Je pense qu'il y a plusieurs éléments. Les médias, malheureusement, ne vont pas très bien et se reproduisent sur des infos nationales ou locales, et s'intéressent de moins en moins aux questions de sécurité internationale. Lorsqu'ils s'intéressent aux questions de sécurité internationale, ils font le tri sur les questions qui leur paraissent les plus graves, sur le plan de la sécurité, y compris de notre propre sécurité, ici en Belgique. Il y a beaucoup de conflits oubliés, pour l'instant, malheureusement, qui partent du tigré, aujourd'hui, qui fait des centaines de milliers d'investis par exemple. Mais je pense aussi que, là aussi, il devrait y avoir des mécanismes plus rapides et plus faciles pour permettre aux médias de travailler directement sur le terrain. Moi, par exemple, je pense que quand il y a une attaque, il devrait y avoir effectivement des mécanismes pour faire en sorte qu'il y ait tout de suite des médias internationaux sur le terrain. Dans certains cas, j'ai eu le sentiment qu'on n'avait pas ces images internationales, pour des raisons que je n'ai pas suivies. Par exemple, quand je me suis déplacé en Arménie, je n'ai pas vu de blessés arméniens. J'avais demandé à les voir, mais je n'ai pas pu les voir. Donc, je crois qu'il y a aussi là un effort pour bien comprendre comment travaille un média international et quel est l'accès qu'il lui-même a besoin pour pouvoir travailler sur le terrain. C'est probablement des questions techniques ou des questions logistiques, mais je pense que c'est important d'y travailler. Par exemple, pour un politique comme moi, quand je vais sur le terrain, et ça avait été le cas lors des bombardements sur l'Arsac en 2020, j'avais pu aller au cœur du conflit. Et ça avait eu quand même une forte résonance. J'avais pu revenir ici au Parlement belge, et alors que les éléments de langage étaient tout à fait inacceptables de la part de la ministre de l'Asserge étrangère à l'époque, renvoyant dos à dos les deux parties, j'avais eu fort de ce que j'avais vu, de ce que j'avais concrètement pu voir comme des gars blessés là-bas et comme drame humain là-bas. J'avais pu faire changer finalement les éléments de langage de la diplomatie belge qui avait finalement condamné ce qui se passait et qui avait fortement évolué sur son positionnement politique. Mais ça c'est indispensable je pense. Je crois que, d'une manière ou d'une autre, l'accès d'observateurs étrangers crédibles au sens ne pas parti au conflit, qu'il soit médiatique ou politique, est très important. Georges Dalman, merci beaucoup pour cette interview, pour le partage de votre expérience, pour quelques recommandations que vous nous avez formulées et sur lesquelles nous allons très certainement travailler. C'est-à-dire qu'on va essayer de continuer la discussion sur, notamment, quelles sont les demandes, quelles sont les propositions du côté arménien, aussi bien dans l'Arménie que dans la diaspora. Vous avez parlé de coordination de communication entre les différents acteurs. Vous avez parlé, d'une manière générale, de travailler de manière plus professionnelle quand il s'agit d'informer soit les médias, soit les institutions politiques. Voilà, beaucoup de travail pour nous. Mais je sais que vous serez encore à nos côtés. Oui, et du côté belge, il y a beaucoup de travail aussi. C'est très clair, je pense que, sur le plan politique en Belgique, je pense qu'il est temps de réaffirmer certains combats, certaines valeurs, certaines priorités. L'Arménie doit, évidemment, en être une et ça c'est ma part de responsabilité. Merci beaucoup. Avec plaisir. Retrouvez Armée de lobby en rediffusion les lundis et mercredis soirs à minuit.

Listen Next

Other Creators