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Théologie queeer

Théologie queeer

Emmanuel SouffletEmmanuel Soufflet

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The main ideas from this information are: - The concept of "queer" originated as an insult but has evolved to become an inclusive term encompassing all sexual orientations and gender identities. - Queer theory is a sociological and philosophical approach that challenges traditional notions of gender and sexuality. - Queer theology is an emerging field that seeks to address issues raised by queer theory within a religious context, particularly in relation to the patriarchal nature of the Church. - Queer theology aims to promote social justice and inclusivity, challenge traditional gender roles, and reevaluate the concept of God and nature. - Further exploration and discussion of queer theology is needed to deepen understanding and foster a renewed Christian reflection. The transcription cannot be retold within the character limit. Perri bonsoir. Bonsoir nos amis auditeurs, bonsoir Emmanuel. Ce soir nous abordons un thème, ce soir nous abordons un thème qui va peut-être surprendre nos auditeurs, le titre est la théologie queer. Vous avez lu père dans la croix récemment le 15 mai dernier un article intitulé la théologie queer prend au sérieux la révolution générée par le christianisme. Alors ça vous a inspiré une réflexion et vous allez nous emmener dans des réflexions philosophiques qui ont toute leur place aujourd'hui bien sûr puisque notre monde est en transformation et nous allons voir probablement des échanges entre des approches plus masculines et des approches peut-être plus féminines, enfin je voulais nous en dire plus. Oui simplement pour introduire ce sujet que vous avez commencé à présenter, disons que c'est un sujet de réflexion qui sort de l'ordinaire, qui piquera l'intérêt et la curiosité de certains, qui éveillera peut-être aussi le soupçon ou le rejet de la part d'autres personnes. Vous avez nommé et c'est ce que nous allons réfléchir la théologie queer. Alors c'est un mot inconnu ou méconnu mais qui est lié à un acronyme que beaucoup de nos auditeurs connaissent, c'est l'acronyme LGBT. Vous allez me dire que vient faire la théologie là-dedans ? Et bien voilà, c'est un peu l'enjeu de cette émission, approcher ce sujet complexe en trois temps, la notion de queer, la théorie queer et la théologie queer. Et nous terminerons bien sûr par quelques intuitions. Alors commençons donc par la notion de queer, vous allez nous redonner la traduction sûrement de queer et nous refaire un petit peu l'historique. Alors queer en anglais c'est un adjectif qui veut dire bizarre ou inadapté et que l'on a appliqué assez vite aux personnes gays, lesbiennes, bisexuelles ou trans. C'est un mot qui était lancé aux hommes pas assez masculins ou aux femmes garçons manqués. Si j'essayais de traduire et j'espère ne pas faire trop d'erreurs, dans le vocabulaire un peu familier, nous on a souvent entendu parler de pédé, de pédale, de tapette, de gouine. Et c'est donc au départ queer est un mot péjoratif. Puis il est devenu petit à petit un mot générique, on va dire un mot englobant, toutes les personnes qui ne s'identifient pas strictement hétérosexuelles ou cisgenres. Cisgenre ça veut dire dont le genre biologique coïncide avec le genre culturel, identitaire. Voilà. Sexe et genre coïncident si vous voulez dans le mot cisgenre. Du fait qu'il est devenu un englobant et un mot générique, ce mot a perdu son caractère péjoratif, il est devenu même une identité en soi. On est queer ou on ne l'est pas. C'est un terme inclusif pourrions-nous dire, qui rassemble toutes les orientations sexuelles et les identités de genre. Derrière genre vous mettez masculin, féminin ou autre. C'est un mot qui permet aussi, du moins dans ceux qui le réfléchissent et qui le mettent en oeuvre, de reconnaître la fluidité de la sexualité humaine et du genre. Et queer a été repris par la suite par la communauté LGBT dont un des acronymes complets est, beaucoup plus que LGBT, si je complète, ça devient 2SLGBTQ+. 2S, ça veut dire ceux qui ont à la fois un spirit, un esprit masculin et féminin ou qui transitent de l'un à l'autre. L, lesbienne. G, gay. B, bisexuel. T, trans. Q, queer ou questionnant, en question. Et plus pour dire, cet acronyme ne prétend pas tout ressaisir, il y en a peut-être d'autres. Voilà, donc on arrive, si vous voulez, et je termine cette première approche de la notion de queer par une définition. C'est à la fois une personne dont l'orientation sexuelle ou l'identité de genre ne correspond pas au modèle dominant. Mais c'est aussi une définition qui peut recouvrir une communauté. Et alors ça devient une communauté, la communauté queer, devient une communauté inclusive et diversifiée qui englobe un large éventail d'identités au pluriel et d'expériences au pluriel, au-delà des normes hétérosexuelles et cisgenres. Alors Père, si je comprends bien, ces personnes qui ont pu se sentir exclues se sont finalement agglomérées, se sont organisées aussi. Cela trouve probablement ses origines de l'autre côté de l'Atlantique. Vous allez sûrement nous développer ça. Et puis il y a un certain nombre de thèses qui sont liées à tout ça. Je crois que vous vouliez nous les développer. Oui, c'est ça. Alors après cette approche du terme simplement queer, il faut en arriver à la théorie queer. Qu'est-ce que c'est que cette théorie ? C'est une théorie à la fois sociologique et philosophique. Elle s'intéresse au genre, genre masculin, genre féminin. Elle s'intéresse à l'exercice de la sexualité. Et troisièmement, il ne faut pas l'oublier ou il faut le savoir, au non-dit de la sexualité et particulièrement à la prostitution et à la pornographie. Dans la théorie queer, il y a ce troisième élément constitutif, donc sur le genre, sur la sexualité et sur le non-dit de la sexualité. Tout ça nous vient des Etats-Unis vers les années 1990, parce qu'on a appelé les études de genre, les gender studies, avec, j'allais dire, une pionnière dont peut-être certains d'entre vous ont entendu le nom, Judith Butler, qui s'est appuyée, et on revient en France là, sur la célèbre phrase de Simone de Beauvoir, « On ne naît pas femme, on le devient ». Voilà, je crois que c'est la base de cette théorie queer. Alors elle comporte, je résume bien sûr, et j'essaye de n'être pas obscur, elle résume trois thèses. Première thèse, la sexualité et le genre ne sont pas déterminés exclusivement par le sexe biologique et génétique, mais aussi par l'environnement socio-culturel et symbolique, par l'histoire de ma vie, l'histoire de nos vies, les histoires de nos vies et les choix personnels. Autrement dit, première thèse, c'est une thèse de différenciation. La théorie queer différencie la sexualité du genre. Et c'est une œuvre de déconstruction de tout l'édifice. Première thèse. La deuxième thèse est une thèse plutôt critique, qui emboîte le pas à la première. La théorie queer critique l'hétéronormativité. C'est-à-dire que c'est finalement l'hétérosexualité qui est normative pour les gens. Et elle est considérée, jusqu'à maintenant, comme innée. Et il y a eu des responsabilités là-dedans des médecins, de l'agente médical, qui, voyant progresser vers les années 1990 par les gender studies, toute une réflexion sur sexualité et genre, a pris peur. A pris peur qu'on entre dans une espèce de confusion entre le masculin et le féminin. Et alors les médecins se sont mobilisés pour chercher des critères anatomiques et psychologiques indiscutables. Et cette hétéronormativité comme innée, d'après l'opinion commune, et aussi comme obligation morale imposée par la société et par les églises, et bien la théorie queer la conteste et la critique. C'est la deuxième thèse. Il y a une troisième thèse qui n'est plus seulement de critique, mais qui est de contestation. Contestation des discours identitaires qui clivent, qui séparent l'humanité de manière binaire, et qui justifient l'hétéronormativité et suscitent par là de la violence et de la domination. Et cette théorie queer dit mais puisque le genre est construit par toutes sortes de choses, et non pas seulement naturel ou pas naturel du tout, et bien une identité de genre peut être déterminée par une construction sociale, dominante. Et bien la théorie queer propose d'échapper à cette construction sociale dominante qui est pour nous tous l'hétérosexualité, ou pour beaucoup. La théorie queer propose d'y échapper par des choix et des pratiques sexuelles autres, qui brouillent les pistes, qui floutent l'identité, qui traversent les frontières communément admises, qui explorent de nouvelles pratiques, pas seulement sexuelles, mais dans toute la vie. Et si vous voulez, vous pouvez vous poser la question, est-ce qu'un sage homme, et non pas une sage femme, est-ce qu'on n'est pas dans la logique queer ? Une femme boxeuse, un homme de ménage, est-ce qu'on n'est pas déjà dans cette recherche, dans cette exploration, dans ce floutage des identités qui est typiquement la logique de la théorie queer ? Alors père, vous nous avez parlé de ces théories queer, elles sont donc au nombre de trois, et vous nous avez très bien expliqué les ressorts de celles-ci. Mais alors là, vous m'emmenez ensuite sur un territoire où je suis un petit peu perdu, mais je suis sûr que vous allez nous aider, moi et les auditeurs, j'espère surtout les auditeurs d'ailleurs, à comprendre en quoi consiste donc la théologie queer. Vite, expliquez-nous, au secours. Oui, alors on n'est plus dans la théorie, je viens d'essayer de vous la proposer assez clairement, mais dans la théologie cette fois. Et bien cette théologie, elle est animée par une nouvelle génération de féministes, et de féministes catholiques. Et elle se situe, pour ceux qui ont un tout petit peu de mémoire, dans la continuité du Comité de la Jupe, avec Anne Soupa, à la suite d'une réflexion peut-être un peu maladroite de l'archevêque de Paris, André 23 à l'époque, et qui a été évidemment l'objet d'une polémique. Mais cette théologie queer va bien au-delà simplement de la question de la place des femmes dans l'église. Cette théologie queer est animée par un collectif, son nom ne s'invente pas, c'est Oh My Goddess, non pas Oh My God, Oh My Goddess. Avec une théologienne qui l'anime, qui s'appelle Anne Guillard, qui est chercheuse à l'université d'Oxford. Elle vient de publier un livre d'ailleurs, au titre évocateur, en écriture inclusive, et volontiers provocateur, le titre c'est Dieu.e, tout le monde comprend. Sur cette idée de godness, de déesse si on avait à le traduire. Voilà, goddess. Une théologie, alors qu'est-ce que c'est que cette théologie ? C'est une théologie qui prend au sérieux les questions soulevées par la théorie queer, et qui essaye d'y répondre ou du moins de les prendre en considération, ces questions soulevées par la théorie queer, de les prendre en considération, je résume là de nouveau, à travers quatre thèses. La première, cette théologie queer se veut d'abord une réponse à une question de justice. Autrement dit de morale sociale si vous voulez, de pensée sociale. Cette théologie queer veut prendre en compte toutes les personnes marginalisées ou silenciées, c'est-à-dire réduites au silence, par l'ordre ou le désordre moral établi. Je parle en prenant leur point de vue, bien évidemment. C'est la première thèse, donc prendre en compte les personnes marginalisées ou silenciées du fait de leur statut et de leur genre ou de leur sexualité. Deuxième thèse, c'est que cet ordre établi selon la théologie queer est généré par une société patriarcale. Une société très patriarcale sur laquelle ou dans laquelle est née l'église. Et donc une église qui est elle-même patriarcale avec sa symbolique. Dieu est la plupart du temps masculin, la plupart du temps, pas toujours. Le Christ est l'époux, l'église est l'épouse obéissante. Mais dès lors que l'on s'introduit dans cette symbolique, va jouer la subordination du féminin au masculin. Et ce type d'église patriarcale, au dire de la théologie queer, va être très vite perçue comme irrespirable aux yeux ou par un certain nombre de chrétiens. Deuxième thèse. Troisième thèse, eh bien cette thèse souligne la nécessité de remettre en cause cette anthropologie dite chrétienne et le concept de nature. D'où l'on a tiré l'idée de complémentarité homme-femme. La différence sexuelle. Et la théologie queer, à la suite de la théorie queer, dit mais le réel est plus complexe, le réel n'est pas binaire. La différence de genre n'est pas dictée par la nature. Mais par la complexité, les complexités dues à tous les acquis socio-culturels, comme je l'ai dit tout à l'heure, les histoires et les choix personnels. Donc, dira la théologie queer, il faut revoir la théologie de l'incarnation. Troisième thèse. Quatrième thèse, eh bien la théologie queer n'entend pas féminiser Dieu. N'entend pas féminiser Dieu. Mais le libérer de la représentation binaire, de la binarité qui est dictée par l'hétéronormativité. Dans la suite de l'identité de genre qui peut prendre une infinité de formes, il faut tenter de qualifier Dieu qui dépasse toujours toutes les catégories. Alors cette théologie, eh bien elle va s'appuyer sur des choses tout à fait orthodoxes, on pourrait dire. Elle dit, par exemple, mais le Christ lui-même a renversé le dualisme mort-vie en introduisant un autre schéma qui est le schéma mort-résurrection. Saint Paul lui-même transgresse les différences sociales et les différences de genre. Lorsqu'il dit, il n'y a plus l'esclave et l'homme libre, il n'y a plus l'homme et la femme, il n'y a plus le juif et le païen, mais tous vous ne faites qu'un. Et puis un père de l'église bien connu de certains de nos auditeurs, Saint Grégoire de Nice, souligne à juste titre que dans la transformation eschatologique qui nous attend, eh bien cette transformation eschatologique sonnera la fin de la distinction de genre. Il n'y a plus ni l'homme ni la femme, c'est dans ce célèbre évangile où Jésus est questionné sur la femme aux sept maris. Et il répond, mais dans le paradis il n'y aura plus ni femme ni mari, vous serez tous comme des anges. Alors voilà, c'est un peu les pierres datantes de cette théologie queer. Bien, merci père d'avoir d'être entré dans cette réflexion. Je suis un petit peu éclairé maintenant grâce à vous. Effectivement, je me comprends mieux. C'est effectivement une partie. Certaines certaines dames se sont approprié cette approche queer pour la décliner. Finalement, en terre chrétienne. Merci aussi d'avoir détaillé tous leurs arguments. Mais alors face à tout ça, père, vous avez sûrement quelques intuitions à nous livrer. Oui, bien sûr, je dis tout de suite qu'elles sont modestes. Parce qu'avec cette théologie queer, vous avez bien pu le remarquer, nous sommes au début d'une réflexion. Elle n'est pas mature, elle n'est pas décantée, elle a besoin de s'approfondir énormément. Et ça se fera, je pense. Mais je me dis qu'on retrouve, c'est ma première intuition comme ça un peu abrupte, on se retrouve devant la fameuse polémique de l'inné et de l'acquis. Le genre, il est à la fois dicté par le sexe biologique, mais c'est la théorie queer qui nous le redit, aussi par les acquis qui viennent ensuite. C'est ma première intuition. On est peut-être dans l'occasion de se réapproprier une réflexion sur l'inné et l'acquis. Et pas seulement l'inné et l'acquis, mais la relation entre les deux, peut-être. Deuxième intuition, je crois qu'avec cette affaire de déconstruction, cette affaire de transgression, de floutage, d'impermanence, on touche à une autre catégorie sociologique et un constat philosophique, c'est que de plus en plus nous entrons dans des sociétés dites liquides. C'est-à-dire de moins en moins structurées. Et beaucoup plus marquées par la fluidité, l'impermanence, le changement sans cesse. Et puis, troisième intuition, c'est que je crois qu'il nous faut devant cette théologie queer, résister à la tentation de nous situer comme ça abrupt, à brûle pourpoint, compulsivement, en pour ou en contre. Il faut approfondir. Il faut creuser les interrogations qui nous sont faites et qui peuvent être, j'allais dire, des tremplins pour une réflexion chrétienne renouvelée qui nous aide à échapper au machisme, au cléricalisme, à l'emprise, à toutes ces choses-là. Et d'ailleurs, je me permets peut-être de terminer là-dessus. Est-ce que ça ne rejoint pas, pour une part, l'effort du pape François ? Même si cette tentative de théologie queer a des maladresses ou des outrances, le pape François qui réfléchit et qui essaye de modifier le statut des femmes dans l'Église et dans la société. Nous voilà à la fin de notre émission. Mais assurément, ce n'est sûrement pas la dernière fois que nous parlerons de ce mouvement queer et il y a beaucoup de choses derrière tout cela. Ce mot queer qui veut dire bizarre, finalement, nous emmène assez loin et peut-être nous questionne et peut-être un questionnement utile, si j'ai bien compris la fin de votre propos. Voilà, je dis à bientôt à nos auditeurs. N'hésitez pas à nous écrire si vous souhaitez en savoir plus. Nous pourrions organiser des rencontres, par exemple, sur ce sujet. À bientôt !

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