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Émission de France Culture 2023
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Émission de France Culture 2023
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Émission de France Culture 2023
Fela Kuti, the Nigerian Afrobeat musician, is celebrated for his music and political activism. He was a mastermind and influential figure in the music industry, creating his unique sound between Lagos, London, and Los Angeles. Fela's home, the Republic Kalakuta, was a hub for his music and activism. He faced political oppression and corruption in Nigeria and used his music to address the issues in his country. Fela's tours were filled with excitement and discovery, but also had challenges, such as losing and finding musicians along the way. The socio-political situation in Nigeria during the 1970s was marked by corruption and a lack of basic necessities. Fela's music reflected the struggles and frustrations of the people. He came from a privileged background, but chose to use his platform to speak out against the government. Fela's impact was felt not only in Nigeria but also globally, with his music inspiring and influencing many. Bonjour Ă toutes, bonjour Ă tous, toute une vie c'est le portrait sonore d'hommes et de femmes qui ont marquĂ© leur Ă©poque et peut-Ăªtre surtout les suivantes. Aujourd'hui, Fela Kuti, la musique est en sport de combat, une Ă©mission proposĂ©e par AnaĂ¯skien avec Sylvia Favre. Il n'a jamais Ă©tĂ© prĂ©sident de son pays, le Nigeria, comme il l'avait prĂ©dit, mais Fela Kuti a gouvernĂ© les corps et les tĂªtes. Fela a Ă©tĂ© cĂ©lĂ©brĂ©, citĂ©, copiĂ© de son vivant, star de l'Afrobeat et maĂ®tre Ă penser, il invente sa musique entre Lagos, Londres et Los Angeles, prĂ©cĂ©dĂ© par ses Queens et les Zombies dictateurs. Tout de suite, Fela Kuti, un portrait documentaire, signĂ© par JĂ©rĂ´me Sandlar et rĂ©alisĂ© par Anne-PĂ©rez-Franquigny. Impossible de se frayer un passage dans cette petite rue du quartier rĂ©sidentiel d'Ikeja, nous sommes devant la maison du roi de la musique Afrobeat, la RĂ©publique Kalakuta, du nom de la première cellule de prison dans laquelle Fela se retrouve en 1974. L'hymne Ekpa, Ă©crit par le père de Fela pour sa rĂ©gion de naissance, L'hymne Ekpa, Ă©crit par le père de Fela pour sa rĂ©gion de naissance, d'Abi Okuta, près de la frontière bĂ©ninoise, entonnĂ© par la famille du chanteur saxophoniste, son corps est exposĂ© au balcon, au premier Ă©tage, Fela repose toujours comme la veille avec un Ă©norme joint de cannabis Ă la main droite, qu'on vienne l'arrĂªter si ça dĂ©range, lance l'un de ses proches. No Marxism, no Leninism, no Capitalism, Africanism. Fela Kuti, la musique est un sport de combat. J'ai 44 ans, je peux jouer de la musique 5 ou 10 ans, je ne suis jamais fatiguĂ©, je rajeunis, parce que la dimension spirituelle de ma musique me porte. La musique est un don spirituel, la musique appartient au futur, la musique est l'arme du futur. Demain, le mois prochain, je serai le prĂ©sident de ce pays. Je serai le prĂ©sident de ce pays, je sais ça. Rene Lenogne, vous avez Ă©tĂ© le rĂ©gisseur de Fela Ă partir du dĂ©but des annĂ©es 80, comment ça se passait les tournĂ©es avec Fela ? C'Ă©tait vraiment que du plaisir, que de la dĂ©couverte aussi, on dĂ©couvrait, c'Ă©tait le dĂ©but de l'afro en France, peu de gens comprenaient ce qui se passait. Donc voilĂ , mon rapport avec eux, c'Ă©tait un peu celui qui arrangeait tout, mais en mĂªme temps celui qui se ferait l'avis, c'Ă©tait, tu rĂ©gis 60 personnes en tournĂ©e quoi. 60 personnes qui se dĂ©plaçaient en permanence ? Le nombre futur de Fela, c'est un nombre incroyable, 60 personnes qui se dĂ©plaçaient en permanence ? Le nombre fluctuait du dĂ©but Ă la fin, mais c'Ă©tait pas toujours les mĂªmes personnes qui Ă©taient Ă la fin de la tournĂ©e et qui avaient commencĂ© la tournĂ©e. D'abord, on en perdait beaucoup de musiciens, on perdait des musiciens autour de route. On les retrouvait, on a pu les retrouver quelques annĂ©es après sur des tournĂ©es. Le mec revenait normalement Ă un concert de Fela, sachant que sa place Ă©tait encore libre. Et gĂ©nĂ©ralement, il rĂ©intĂ©grait la troupe. Et donc, c'est pour ça qu'on avait toujours ce qu'on appelait des spare musicians, des musiciens de remplacement. On avait donc deux bassistes, deux batteurs, des Ă©lĂ©ments qui ne peuvent pas te monter sur un groupe. C'est un peu les balais des rĂ©gimes soviĂ©tiques Ă la belle Ă©poque, quand ils visitaient l'Europe, ils en perdaient toujours, il y en a qui passaient Ă l'Ouest. Nous, c'Ă©tait un peu le cas, il y en a qui passaient Ă l'Ouest. Tout Ă©tait Ă apprendre, et aussi pour eux, parce qu'ils venaient de LĂ©gos. Dans les annĂ©es 80, c'Ă©tait plus Blade Runner qu'autre chose, LĂ©gos Ă cette Ă©poque-lĂ . Dans ce cĂ´tĂ© d'une sociĂ©tĂ© après technologie, le Nigeria dans les annĂ©es 70 a connu un boom industriel extraordinaire grĂ¢ce au pĂ©trole. Troisième producteur de pĂ©trole dans le monde, il y a du pognon qui coule Ă la pelle, dans une corruption qui n'avait pas de nom. Tout Ă©tait inventĂ© avec des usines qui Ă©taient construites et qui n'ont jamais Ă©tĂ© terminĂ©es, une infrastructure routière qui s'est arrĂªtĂ©e du jour au lendemain, un aĂ©roport qui n'Ă©tait pas du tout fait pour Ăªtre Ă LĂ©gos, mais qui avait Ă©tĂ© prĂ©vu pour Ăªtre fait Ă Munich. Donc, tout Ă©tait comme une citĂ© qui a connu la technologie et oĂ¹ tout s'est arrĂªtĂ©. Donc, tu as une ville qui est faite pour l'Ă©lectricitĂ© alors que tout le monde marche avec des groupes Ă©lectrogènes. Il fait nuit, il fait du bruit, les gens vivent comme ils peuvent, c'est Blade Runner, il y avait vraiment de la survie. Vous voyez ce qui se passe au Nigeria ? Il faut que j'en parle dans mes chansons, de manière directe, afin que le peuple puisse comprendre ce qui se passe. Le moral des gens est au plus bas. Pas de nourriture, pas d'eau, pas de lumière, pas de gouvernement. Les gens sont Ă cran. Pas de situation solide. Les racines sont perdues. Nos sĂ©nateurs font des allers-retours en AmĂ©rique tous les jours et rien ne change dans mon pays. Il y a beaucoup de voleurs. Le peuple pense qu'il doit se faire justice lui-mĂªme, alors il n'hĂ©site pas Ă lyncher ou Ă tuer toute personne suspectĂ©e de vol. Et c'est mal. C'est indigne des Africains. C'est un genre de comportement criminel du gouvernement. Cette atmosphère criminelle est crĂ©Ă©e de toutes pièces par le gouvernement qui profite des gens instables. C'est fascinant, car il y avait beaucoup de militaires gradĂ©s qui Ă©taient Ă l'Ă©cole avec lui. Il est parti dans la bourgeoisie nigĂ©rienne, la bourgeoisie yoruba. Son père est celui qui, le premier, a conduit une voiture qui a Ă©tĂ© vendue par le gouvernement. La bourgeoisie yoruba, son père est celui qui, le premier, a conduit une voiture dans les rues d'Abeokuta. Abeokuta, c'est une grande ville qui se trouve au nord-ouest de LĂ©gos. Abeokuta est une ville assez particulière, dans la mesure oĂ¹ c'est lĂ que se sont installĂ©es la communautĂ© hekba du peuple yoruba. Cette communautĂ© hekba a Ă©tĂ© celle qui a Ă©tĂ© la première christianisĂ©e par les prĂªcheurs anglicans. Ce sont des populations qui ont Ă©tĂ© Ă©duquĂ©es par tous ces rĂ©vĂ©rends, les pasteurs. Le grand-père de Fela a Ă©tĂ© l'un des yorubas de la communautĂ© hekba le plus cĂ©lèbre dans le monde anglican, jusque mĂªme Ă Londres, parce qu'il Ă©tait pasteur chantant. Il s'appelait Josiah Jesse Ransom Cootie, ce qui explique d'ailleurs pourquoi, beaucoup plus tard, il a absolument voulu se dĂ©barrasser de ce nom de Ransom, qui pour lui Ă©tait une tĂ¢che indĂ©lĂ©bile sur le nom de sa famille africaine yoruba et hekba, pour prendre celui de Anikulapo, donc qui est un nom africain. Dans quelles circonstances avez-vous rencontrĂ© Fela ? J'ai rencontrĂ© d'abord le Nigeria et l'Egosse. Lorsque j'Ă©tais Ă l'Egosse en 1975, Fela n'Ă©tait pas lĂ , il Ă©tait au Ghana, rĂ©fugiĂ© au Ghana. Mais toute la ville transpirait de Fela, la musique de Fela Ă©tait de partout, les anecdotes autour de lui, donc toute la jeunesse de l'Egosse Ă©tait imprĂ©gnĂ©e de Fela. Je trouvais que les gens de l'Egosse parlaient de Fela, en tous les cas des phrases entières, des attitudes, des sentences, des slogans de Fela qui Ă©taient vĂ©hiculĂ©s. Water no get enemy, African is the force of the mind, fear is not for men, tous ces slogans Ă©normes que les gens portaient. Le verbe de Fela habitait les chauffeurs de taxi, c'Ă©tait une lĂ©gende dĂ©jĂ . On racontait qu'il Ă©tait immortel, qu'il dĂ©fiait la loi, qu'il n'avait pas peur de la police, que des choses qui ne donnaient qu'envie de le rencontrer. Brothers and sisters, the father of Pan-Africanism, Dr. Kwame Nkrumah, says to all black people all over the world, the secret of life is to have no fear. We all have to understand that. On arrive chez lui le matin, Philippe Conrath, et dĂ©jĂ c'Ă©tait assez bizarre parce qu'il y avait un arbre sans feuilles et Ă la place des feuilles il y avait plein de bouts de papier, donc on se demandait qu'est-ce que faisaient tous ces bouts de papier qui Ă©taient accrochĂ©s Ă l'arbre. C'est un type qui est venu dealer des bibles il y a deux semaines et je pense que la parole divine, le mieux c'est qu'elle soit accrochĂ©e dans l'arbre. Et j'arrive chez lui, donc il avait une longue pièce rectangulaire, alors il y avait un espèce de fauteuil Ă©norme, fauteuil en cuir, style lĂ©vitant au milieu. Les gens Ă©taient assis tout le long de la pièce, sur les cĂ´tĂ©s de la pièce et jusqu'au fond. Et donc cela me dit, qu'est-ce que tu fais lĂ ? Je lui dis, je voudrais t'interviewer, je fais un film, c'est juste une petite interview. Et il me dit, je vais t'interviewer, je voudrais t'interviewer, je fais un film, c'est juste une petite interview. Et il me dit, ouais d'accord, c'est 1000 dollars. Je le regarde, je dis non, c'est pas 1000 dollars, parce que moi j'ai pas 1000 dollars, c'est une bière. Il me dit non, non, ça va pas du tout, pas d'interview. Il me fait asseoir Ă sa gauche. LĂ donc il Ă©tait en slip blanc. Puis on commence Ă discuter, il part Ă l'arbre, il discute et tout. Évidemment tout le monde fume, des gros gros pĂ©tards. Et donc je sais pas, au bout d'une heure, une heure et demie, il s'adresse Ă tous les gens qui Ă©taient lĂ et il dit, vous Ăªtes peut-Ăªtre Ă©tonnĂ© de voir ce blanc lĂ qui est assis Ă cĂ´tĂ© de moi, vous savez pas qui c'est, vous savez pas ce qu'il veut. Il veut m'interviewer, je lui demande 1000 dollars, il me dit que je vais avoir une bière. Il y a la tĂ©lĂ© amĂ©ricaine qui est juste venue avant, eux ils m'ont proposĂ© plein d'argent. Mais pour la France, pour Jack Long, pour Mme Mitterrand, qui ont fait que j'ai pu Ăªtre sorti de prison, je vais faire l'interview gratos. Il se tourne vers moi, il me dit, attends-moi juste, je vais changer de slip. Et Fela, lui, il vivait dans quel environnement ? Alors Fela vit dans un endroit qu'on appelle Calakouta, qui est une espèce de... Calakouta rĂ©publique, j'ai trouvĂ© un fantasme, je sais pas d'oĂ¹ ça vient, c'est une ferme de rĂ©publique, mais c'Ă©tait plus une communautĂ©, une communautĂ© de bien ou de mal, je sais pas, mais une communautĂ© de gens qui s'agrĂ©gaient autour de Fela, parce qu'il y avait Ă manger. Donc autour de lui, il y avait un tas de mecs qui Ă©taient lĂ , et comme tout le monde devait se rendre utile, il y en a qui se rendaient utile en Ă©tant musiciens. Et puis voilĂ , ça crĂ©ait une espèce de tribu, dans un lieu oĂ¹ tout se passait. Fela, c'Ă©tait vraiment un chef coutumier, qui avait une morale, qui transmettait quelque chose, qui Ă©tait respectĂ©, il n'Ă©dictait pas la loi, mais il donnait des rĂ©ponses Ă des questionnements, donc politiques en particulier, parce qu'il y avait des gens qui lui posaient des questions politiques, il Ă©tait engagĂ© auprès d'un tel ou d'un tel politiquement, ça c'est une chose, et la deuxième chose aussi, il y avait des gens qui venaient lui demander de l'aide, lui demander de l'argent. Je pense qu'il y avait un mĂ©lange entre l'Afrique du chef coutumier et le leader politique, et la star musicale, c'est-Ă -dire en fait, il faisait le syncrĂ©tisme entre les trois. Mais c'Ă©tait plus près de la communautĂ©, telle qu'on avait pu les connaĂ®tre dans les 60 ou les 70, qu'il y avait une rĂ©publique organisĂ©e dans tous les cas. Il s'affoisonnait de bonnes idĂ©es en tous les cas, Fela, c'Ă©tait une certitude. C'Ă©tait les gosses, mais centrĂ©s sur Fela. Donc il y avait des vendeurs de nourriture, des rouleurs, beaucoup de jeunes, des jeunes qui sont en rupture de banque, des jeunes qui refusent les règles familiales qu'on leur impose, des jeunes qui ne veulent pas qu'on leur montre un chemin qu'ils n'ont pas envie de suivre, et qui, dans les paroles de Fela, ne veulent pas qu'on leur montre un chemin qu'ils n'ont pas envie de suivre, et qui, dans les paroles de Fela, entendent le discours qu'eux ont envie d'Ă©couter. La police est arrivĂ©e avec cinq voitures, des Land Rovers, de gros camions. Ils ont commencĂ© par entourer la maison, puis Ă matraquer tout le monde, Ă jeter des gaz lacrymogènes. Ils nous ont tous fait sortir en nous frappant. Après ils ont frappĂ© Fela, ils ont tout volĂ©, tout notre argent. Nous ne savons mĂªme pas ce que le reproche a fait lĂ . Je les assure d'une chose, s'ils croient que je vais changer ou modifier mon attitude, ma façon de vivre, mon expression, mon but politique, ils me rendent plus fort. Je suis bien plus fort maintenant. Vous voulez voir comment la police m'a battu ? Je vais vous montrer. Regardez. Ils m'ont dĂ©moli. Je ne suis pas mort, parce que mon nom n'est niquĂ© de vous. J'ai la mort dans ma poche. Je ne peux pas mourir. Ils ne peuvent pas me tuer. Ils veulent dĂ©truire le temple. Ils l'appellent zone dangereuse dans le journal, sur ordre de la police. Mais les gens n'auront pas peur de venir mardi. Fela, comme son nom africain l'indique, un Nikulapo qui porte la mort dans son carquois, Fela n'a peur de rien. Personne ne lui fera changer de chemin Ă partir du moment oĂ¹ il a dĂ©cidĂ© de prendre celui qu'il a envie de prendre. Évidemment, pour le pouvoir, une personnalitĂ© aussi obstinĂ©e est aussi Ă©coutĂ©e, parce que c'est vrai qu'Ă partir de 1973, 1974, 1975, Fela a un terrible Ă©cho dans le peuple. Il enregistre jusqu'Ă 8 albums par an. Ses chansons sont reprises et Ă©coutĂ©es partout dans tout le NigĂ©ria, et au-delĂ du NigĂ©ria. Et tout cela, ça gĂªne Ă©normĂ©ment le gouvernement. Parce que Fela dit tout ce qui se dit dans le peuple, Fela le dit dans ses chansons. Combien ils s'en veulent, combien ils n'ont pas une idĂ©e rĂ©elle de ce que doit Ăªtre un gouvernement africain. Parce que tous ces gens qui s'approprient toutes les richesses du pays ne font qu'une chose, c'est imiter les Blancs, pour faire en sorte que le pouvoir soit organisĂ© exactement comme les colons l'avaient organisĂ© auparavant, mais pour leur seul profit. Ils s'habillent comme les Blancs, ils parlent comme les Blancs, ils vont voyager en Angleterre comme les Blancs, ils prennent l'avion, etc. Il y a une chanson lĂ -dessus qui est vraiment magnifique pour ça. Et d'ailleurs, c'est pour moi l'un des meilleurs enregistrements que Fela ait jamais fait, c'est J.J.D. Journey Just Drop. Il a fait tout ça pour devenir un vrai Africain. C'Ă©tait très rare, quelqu'un qui osait dire ce qu'il pense. Donc ça c'est une forme de modernitĂ©, une modernitĂ© qui prĂ©figure la modernitĂ© qu'on est en train de vivre aujourd'hui avec les rĂ©volutions africaines. Parce que, en Afrique, et en particulier en Afrique de l'Ouest, c'Ă©tait l'Ă©poque des griots. Et les griots Ă©taient des interprètes de l'histoire, mais Ă©taient souvent utilisĂ©s par les pouvoirs pour faire les louanges du pouvoir. Et donc, Fela Ă©tait très très très diffĂ©rent de ce qui pouvait se passer sur toute l'Afrique. C'est une Ă©popĂ©e fabuleuse, parce qu'il y a beaucoup d'argent, Ă©normĂ©ment d'argent. Fela a constituĂ© les Young African Pioneers, les YAP, pour passer son message politique et faire circuler ses idĂ©es Ă travers cet organe de presse. Fela a constituĂ© tout un rĂ©seau de correspondants de son mouvement politique Ă travers l'ensemble des rĂ©gions du Nigeria pour un gouvernement qui se croit tout permis parce qu'il a rĂ©duit les bienfrais au silence et Ă la mort aussi. C'est une insulte qu'il ne peut pas supporter. On a fait l'interview, rapidement, c'Ă©tait vraiment 5 minutes, il exprimait sa position sur le fait que, lui, pour nourrir sa musique, pour crĂ©er, il fallait qu'il soit Ă Lagos, qu'il reste au Nigeria, et mĂªme qu'il lutte. Et il me dit Ă la fin de l'interview de toute façon maintenant tu restes avec moi et je vais te montrer comment Fela reçoit les Ă©trangers, tu ne bouges plus, tu restes avec moi, tu es mon invitĂ©. Il nous a d'abord emmenĂ© dans un club très huppĂ© sur une des Ă®les de Lagos oĂ¹ lĂ il jouait en quartet les standards du jazz des annĂ©es 50, 60, du bebop. C'est Ă Londres qu'il a dĂ©couvert le jazz et Ă Londres il a commencĂ© Ă Ă©couter, en plus c'est la fin des annĂ©es 50, l'explosion du jazz extraordinaire avec notamment le cool jazz de Miles Davis. Et lĂ , Ă ce moment-lĂ , je crois qu'il est complètement captĂ© par la trompette de Miles. Il s'y essaie sur une scène de Londres et je crois qu'il a un gros revers parce qu'il s'aperçoit qu'Ă ses cĂ´tĂ©s il y a des jammeurs qui jouent nettement mieux que lui et ils mettent toujours la barre très très haut. Et il s'aperçoit aussi, il est toujours très conscient de ses limites musicales. Et c'est pourquoi en 1965 il dĂ©cide de virer tout son groupe et d'en remonter un avec des musiciens hors terre dont, Ă©videmment, le cĂ©lèbre Tony Allen Ă la batterie. Oui, alors, Tony Allen, c'est un grand batteur. Il a surtout une qualitĂ© exceptionnelle sur le jeu de la cymbale. C'est un grand joueur de cymbale. Et il a une façon d'effleurer les peaux de Kessler et de Tom très très fine. Il joue des mĂ©lodies carrĂ©ment avec sa batterie. C'est très intĂ©ressant, un peu comme les batteurs de jazz d'ailleurs. Bon, dĂ©jĂ dans les annĂ©es 68-67, on a peut-Ăªtre quelques petites notions un peu de l'afrobeat mais ce n'est pas au niveau de la batterie c'est plus au niveau de l'architecture sonore comment Fela arrive Ă placer les vents par rapport Ă l'ensemble de ses compositions. Et comment les vents deviennent un moteur complètement de ses crĂ©ations. Quand il fait ça, il tourne complètement le dos au High Life. Oui, alors, Tony Allen, le High Life, c'est notre musique populaire locale. Celle que tous les Africains de l'Ouest jouaient Ă l'Ă©poque au Ghana, au Nigeria. Nous avons le Fuji, la Juju, tous ces styles de musiques locaux. Le langage de Fela, de celui qui va devenir Anikula Pokuti, celui qui a la mort dans son carquois, ce langage lĂ , qui va devenir extrĂªmement fort, extrĂªmement presque agressif contre toutes les dĂ©rives de l'Etat qui va se formuler dans les annĂ©es 70. Il va naĂ®tre seulement après le voyage qu'il fait aux Etats-Unis. LĂ , on entre dans un autre monde. Lorsque je suis allĂ© aux Etats-Unis en 1969, j'ai Ă©tĂ© complètement subduit. J'Ă©tais assez silencieux dans la rue. J'Ă©coutais les gens parler. On se retrouve Ă Los Angeles et Ă Los Angeles, donc on est en 1969, donc en pleine Ă©meute, puisque les Ă©meutes de West, c'est cette Ă©poque-lĂ . On a dĂ©jĂ passĂ© l'Ă©poque de Martin Luther King, etc. Et lĂ , on est vraiment... Les leaders sont les Black Panthers, le Black Panther Party, et la violence est prĂ©sente, très prĂ©sente, surtout en Californie et Ă Los Angeles. Et c'est Ă ce moment-lĂ que Fela va rencontrer Sandra Smith, qui est une militante Black Panther et qui voit Ă travers Fela, Ă travers ce jeune homme qui est très beau, quelqu'un qui reprĂ©sente vraiment l'idĂ©al de l'Afrique qui doit se libĂ©rer. Mais Fela n'a aucune notion de ce qu'ont les Black Panthers dans la tĂªte et c'est Sandra Smith qui va l'Ă©duquer. Elle me parlait de l'Afrique. Elle me disait, sais-tu que les Africains ont appris tout ce qu'ils savent aujourd'hui ? J'ai rĂ©pondu, tu dis n'importe quoi. Elle me dit, il y a des livres. Je lui ai dit, montre-moi. Et elle m'a passĂ© un livre de Malcom X. C'est Ă ce moment-lĂ que vont naĂ®tre les premiers rugissements de l'Afrobeat mais cette fois, les paroles ne sont pas encore lĂ . C'est vraiment le cri primal de l'Afrobeat et ça va devenir, après quelques annĂ©es, le cri primal de l'Afrobeat. C'est vraiment le cri primal de l'Afrobeat et ça va devenir après quelque chose d'extraordinaire. Il va libĂ©rer la parole quand il va rentrer Ă Lagos. Les mots qui viennent sont des mots en pidgin, c'est-Ă -dire des mots pidgin-english qui sont comprĂ©hensibles par toute la sociĂ©tĂ©. Il y avait quelque chose qui Ă©tait une architecture musicale absolument moderne autour d'une rythmique de bĂ©ton et avec un big band et avec, Ă l'intĂ©rieur de ça, toute cette relation entre les cuivres et la rythmique et le chant qui Ă©tait absolument incroyable et qui pouvait faire penser, et lĂ son passage en Angleterre l'a amenĂ© vers ça, au grand big band amĂ©ricain du jazz. C'est une façon de composer de l'oralitĂ©. C'est-Ă -dire qu'avec tout ce que Fela a pu apprendre en grand G chez les occidentaux sur la composition musicale, une fois qu'il s'est libĂ©rĂ© de l'Ă©criture harmonique, etc., et qu'il a pris Ă bras le corps l'oralitĂ©, c'est-Ă -dire que il a pris Ă bras le corps la rĂ©alitĂ© de l'oralitĂ© africaine, il a pu construire des basses sonores. Donc pour moi, Fela, c'est un sculpteur de son. ... James Brown, lorsqu'il vient en tournĂ©e en Afrique au dĂ©but des annĂ©es 1970, vient au club de Fela, qui est donc le shrine, le temple, et un de ses musiciens se met Ă compter du batteur Tony Allen et commence Ă Ă©crire comment se joue cette musique. Donc on peut dire que si Fela a Ă©tĂ© inspirĂ© par James Brown, et c'est vrai qu'il l'a Ă©tĂ©, James Brown aussi s'est inspirĂ© de Fela. ... La voix vient donner des messages et après la parole vient la danse, parce qu'il n'y a pas de parole sans danse, il n'y a pas de parole. C'est une des queens, il avait des queens, il avait des femmes, alors la lĂ©gende, il en a Ă©pousĂ© quelques-unes, alors le chiffre varie, je ne sais pas, un jour il en a Ă©pousĂ© une douzaine, en mĂªme temps il y avait des choristes, des danseuses, quelques-unes Ă©taient la mère d'enfants Ă lui, maquillĂ©es, magnifiquement maquillĂ©es, ça c'est une rĂ©pĂ©tition Ă Londres. ... Les femmes de Fela c'Ă©tait des fourmis, des queens, c'est une organisation, elles remassaient sur la tournĂ©e tout ce qui traĂ®nait dans les backstage, la moindre boisson, le moindre canne de soda Ă©tait remassĂ©, les fourmis sont passĂ©es, il ne restait rien, mĂªme une serviette en papier elle les prenait, on ramène ça Ă Lagos oĂ¹ on va tout vendre, tout ce qu'elle pouvait prendre elle le prenait, elle le mettait dans des sacs on voyait bien que le remonter dans le bus Ă©tait de plus en plus compliquĂ©, il y avait de plus en plus de sacs qui Ă©taient de plus en plus lourds, des caisses qui Ă©taient très très lourdes, on les voyait, mais jamais, Fela dans tout ça, comment il rĂ©agissait ? Très cool, le mec derrière les autres, d'ailleurs jamais en front line, toujours le dernier, il laissait tous les autres les femmes qui hurlent, les mĂ´mes qui pleurent, les musicos qui s'engueulent ou qui se battent, ça crĂ©e un chaos, tu as du pouvoir, il va rien t'arriver, et c'Ă©tait vraiment l'impression qu'on avait qu'il ne nous arriverait rien Ceci est le shrine, le temple, car plus qu'une boĂ®te de nuit, c'est bien d'un temple dont il s'agit, puisque voici son hĂ´tel, en son centre, veillant sur la bonne ordonnance du culte, le buste de Nkrumah. Aux quatre coins du shrine, les photos du souvenir, Malcolm X, la mère de Fela, le Mumba, Martin Luther King. Une nuit au shrine, l'autre Ă Pelerinade. Aux quatre coins du shrine, la mère de Fela, le Mumba, Martin Luther King. Une nuit au shrine, la mère de Fela, Martin Luther King. Une nuit au shrine, la mère de Fela, Martin Luther King. Une nuit au shrine, la mère de Fela, Martin Luther King. 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Allons-y. 1, 2, 3 1, 2, 3 Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere Koyahu Dekabere 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